Le marché du gaz, enjeu majeur entre l’Europe et l’Asie

Le marché du gaz,

enjeu majeur entre l’Europe et l’Asie

Rémi Perelman, Asie 21, novembre 2014

Plan

I . Un fournisseur, russe – européen et asiatique

II . Le marché européen (UE28) du gaz

III . Le marché asiatique (Asie4) du gaz

IV . Le marché du gaz, généralités

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I . Le fournisseur russe

1) L’énergie dans les échanges commerciaux extérieurs de la Russie

La Russie possède les plus importantes réserves mondiales de gaz

Les réserves de gaz naturel russes comptent pour le tiers des réserves prouvées du monde et leur exploitation, pour 17,8% de la production mondiale. Au 1er rang des exportateurs de gaz naturel en 2013, elle exporte 29 % de sa production (203 Mm³, soit 23 % des exportations mondiales, 2e le Qatar, 121 Mm³), et ce malgré une baisse de près de 6 % par rapport à 2012.

En 2013, 50% des recettes du budget fédéral provenaient des droits de douane sur le pétrole et le gaz naturel.

Si sa part recule dans les importations de l’actuelle UE 27 depuis la fin des années 1990, sous l’effet d’une volonté européenne de diversification des sources d’approvisionnement, elle reste son premier fournisseur de gaz naturel.

Les énormes réserves du gisement de South Pars font de l’Iran un compétiteur significatif sur le marché gazier et un défi potentiel pour la Russie en cas de levée des sanctions (et si Téhéran consent les investissements nécessaires).

2) La politique énergétique russe, fondée sur

  • le contrôle direct (3 compagnies d’État : Gazprom, Rosneft, Transneft) ;
  • la diversification (réorientation vers ports de la Baltique et Mer Noire, Vladivostok, exportation de produits raffinés plus que brut, raffinage, GNL, Asie) ;
  • les énergie alternatives (biomasse, solaire, énergie marémotrice ;
  • l’efficacité énergétique, moitié moindre que celle de la moyenne des pays de l’UE.

3) Les trois opérateurs : Gazprom, Rosneft et Novatek

Le secteur russe des hydrocarbures est géré par trois monopoles étatiques (Gazprom pour le gaz et les gazoducs, Rosneft pour le pétrole et Transneft pour les oléoducs), situation contraire aux textes européens.

Gazprom

Gazprom (détenue à 51 % par l’Etat russe) exporte 80 % du gaz russe. Facteur structurant des relations de l’État avec ses partenaires internationaux, Gazprom, société cotée en Bourse répond également à un objectif commercial, dont l’État russe tire des ressources considérables (73 milliards de dollars en 2013, soit 14% des recettes totales à l’export). Gazprom poursuit son intégration industrielle en Europe au plus près de ses clients, comme opérateur de centrales thermiques (nord de la France, Belgique, projets en Grande-Bretagne). La production de gaz naturel a augmenté de 2,1 % à 668 MMm³ ; mais celle de Gazprom a connu une nouvelle baisse à 476,1 MMm³, ses ventes en Europe continuant à régresser et son recentrage sur le gaz liquéfié, plébiscité par l’Asie et l’Amérique Latine, ayant été trop tardif.

Agacé par ses archaïsmes, Vladimir Poutine ne soutiendrait plus Gazprom, qui pourrait être restructurée (ou dépecée) car elle présente des points faibles :

  • Alors qu’il lui faudrait 60 milliards de dollars pour développer ses capacités de production et de transport, Gazprom favorise la croissance externe par les prises de participation ou l’acquisition de sociétés ;
  • Lourdeur administrative (direction cloisonnée en clans, difficulté à assumer des choix stratégiques clairs ; endettement important) ; gestion réputée opaque, peu efficace, corrompue ;
  • Réactivité insuffisante quant aux nouvelles technologies, notamment pour le GNL ; cécité face aux conséquences de la percée du gaz de schiste américain sur les tarifs, qui ont chuté sur les marchés « spot » bien au-dessous des prix qu’elle facturait dans ses contrats de long terme ou « contrats take-or-pay » ;
  • manque d’ouverture et d’ambition à l’international, dans les projets comme dans le management.

Sans que Gazprom soit dans une situation critique (bénéficiaire du contrat du siècle de 400 MM$ ; sa part dans le gaz européen passera de 25 à 30 %), la question se pose de savoir combien de temps elle pourra conserver le rôle principal sur les marchés européens. La compagnie dispose d’une capacité de production supplémentaire, et donc d’un différentiel de prix qui lui permettrait d’affaiblir ses concurrents et de l’emporter sur tout autre projet d’approvisionnement européen. Elle s’adapte à la libéralisation des marchés européens, investit dans des technologies pour maintenir sa production et sa performance financière ne cesse de progresser, mais avec un retard qui l’handicape. La Russie est-elle capable de réformer son secteur énergétique.

Le draft stratégie de janvier 2014 du ministère russe de l’Énergie pour 2035, réformiste préconise d’encourager les compagnies indépendantes, la révision du système des prix avec l’Europe en échange d’une législation plus favorable, la réforme des taxes , l’intégration de la Communauté des États indépendants. Avec la libéralisation en cours, Gazprom n’a plus le monopole des exportations : Rosneft et Novatek, les nouveaux venus en pleine ascension et diversification, vont profiter de la libéralisation des exportations de GNL, ils font pression pour qu’il en soit de même avec le gaz naturel. Cette libéralisation, décidée en 2012 est effective depuis le 1er janvier 2014 vers les nouveaux marchés de GNL asiatiques.

Rosneft, le plus important producteur de pétrole au monde avec 4,5 millions de barils par jourmonte en puissance depuis 2012 en y ajoutant le gaz. Son président, Igor Setchine, très proche de V. Poutine, est considéré comme le second personnage de l’État. Rosneft a racheté le producteur russe de gaz Itera et, doublant Gazprom et Novatek, la part d’Enel dans la société gazière sibérienne SeverEnergia, prévoit de pousser sa production de gaz à 100 MMm3/an d’ici à 2020, contre moins de 40 aujourd’hui, ce qui suppose la récupération d’actifs de Gazprom. Points faibles : le groupe s’est lourdement endetté avec le rachat de TNK-BP et Itera, qui va handicaper le groupe lorsqu’il s’agira de financer les investissements exigés par ces projets. Il ne représente que 10 % des réserves gazières de Gazprom.

L’objectif de Rosneft est de devenir un groupe global multi produits avec des partenariats internationaux et recrutement de managers occidentaux.

Entre Gazprom et Rosneft, l’arbitre reste l’Etat (le Kremlin), actionnaire majoritaire des deux groupes. Le pays peut se permettre d’avoir deux géants, Gazprom et Rosneft.

Novatek traite 9% environ de la production russe de gaz en 2013. Ce groupe privé en pleine ascension avec l’usine de liquéfaction de gaz naturel (GNL) située sur la péninsule de Yamal (Nord-Ouest de la Russie), associé à Total et en passe de l’être avec la China National Petroleum Corporation, CNPC en décembre 2014, (20 % chacun). C’est la première fois qu’une compagnie chinoise participe directement à un projet russe de gaz pour l’exportation. La production est prévue pour démarrer en 2017 et doit atteindre à terme 16,5 millions de tonnes de GNL/an. Le groupe travaille envisage une deuxième usine de GNL sur le même site. Avec Yamal, la Russie vise notamment le marché asiatique via la route de l’Arctique. Les premiers méthaniers brise-glace commandés dans le monde permettront de relier Yamal à bon nombre de ses clients en Asie du Nord-Est en traversant l’océan arctique.`

4) Gisements et réseau des gazoducs

Gazprom domine le réseau de gazoducs russes vers l’Europe, dont huit (sur dix) sont consacrés à l’exportation. Vers l’Asie, le contrat avec la Chine lui permet de construire le gazoduc Sibérie orientale – océan Pacifique (Eastern Siberia-Pacific Ocean Oil Pipeline, ESPO) avec deux branches : vers le NE chinois (38 Mm3/an dès 2018) et  vers Vladivostok (pour Japon, GNL).

Sibérie occidentale

Le déclin des trois gisements géants du Tioumen (Ourengoï, Yambourg et Medvejye) fournissent le noyau de la production russe est compensé par les nouvelles ressources de la péninsule de Yamal. Plusieurs gisements, notamment Bovanenko, seront reliés à l’Europe, tandis que Tambey pourrait alimenter un projet de GNL.

Sibérie orientale

Les réserves de gaz sont importantes, dont celles de la région du lac Baïkal, notamment avec le gisement de Kovytka. La Sibérie orientale est une région productrice majeure de gaz.

Extrême-Orient

Sakhaline possède des réserves équivalentes à celles (restantes) de la Norvège. En 2007, des découvertes ont été annoncées en offshore à l’ouest du Kamtchatka. Un gisement de grande taille a été repéré par Rosneft associé à des entreprises sud-coréennes. Il n’y a pas encore d’estimation des réserves probables de cette région mais d’après Rosneft elles pourraient être comparables à celles de Sakhaline.

L’Arctique

La faible connaissance de la géologie des bassins sédimentaires, notamment dans le domaine offshore, ne permet pas encore d’évaluer la richesse en gaz des gisements de l’Arctique, près de 25% des réserves mondiales dit-on.  Par contre, les bassins de l’ouest sibérien et les gisements offshores du plateau continental des mers de Kara et de Petchora, qui ont la particularité d’être à faible profondeur et proches de la côte, sont mieux connus. L’extraction du gaz pourrait y intervenir dès 2015.

NB la Russie découvre avec régularité de nouveaux gisements d’hydrocarbures.

Gaz non conventionnels/gaz de schiste

Les premiers hydrates de gaz naturels découverts dans le permafrost datent de la fin des années 1960 en URSS. Ils ont été exploités depuis 1969 à Messoyakha (Sibérie occidentale) à environ 800 mètres de profondeur, en utilisant la méthode de dépressurisation. Le pays affirme avoir produit 5 Mm³ de gaz à partir de ce réservoir.  En 1972, les premiers hydrates de gaz océaniques sont observés par des géologues russes en Mer Noire.

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Les méthodes de déploiement international de Gazprom

1) Prise de participation

Les méthodes utilisées par la Russie et les acteurs énergétiques russes pour renforcer les liens avec l’ouest de l’Europe sont variées. Cela passe d’abord par des prises de participation directes par les entreprises énergétiques russes et dans les réseaux de conduites dans de nombreux pays européens :

  • Gazprom a des participations dans des entreprises de transport situées en Allemagne, en Finlande, en Pologne, en Slovaquie et au Belarus (50% de Beltransgaz et 48% d’EuroPolGaz).
  • Gazprom possède des actifs dans des entreprises de distribution, marketing et vente en Allemagne, Autriche, Estonie, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Italie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République tchèque, Slovaquie, Suisse. Dans les pays baltes, par exemples, ses positions sont très solides. Gazprom est donc directement impliqué dans la vente de gaz aux consommateurs de certains pays qui sont par ailleurs dépendants de la Russie pour la totalité de leurs importations et de leur consommation.

Cela prend aussi la forme d’une pénétration indirecte en utilisant des partenaires européens comme tremplin avec la création de filiales communes :

  • Gazprom renforce ses partenariats avec quelques énergéticiens allemands : création en 1993 avec BASF (par le biais de sa filiale Wintershall, premier producteur allemand de gaz et de pétrole) d’une société mixte commune (aujourd’hui à 50/50), Wingas, spécialisée dans la distribution de gaz en Allemagne et dans des pays voisins. Cela permet à Gazprom d’accéder aux consommateurs allemands finaux et à ceux d’autres pays. Wingas est utilisée par Gazprom comme un tremplin vers d’autres marchés qu’elle n’arriverait pas à atteindre seule. Cela se fait de plusieurs façons : acquisitions faites par Wingas sur des marchés en dehors d’Allemagne, création de filiales (Wingas Europe) et participation de Wingas à des investissements dans divers pays européens (financements d’infrastructures).
  • Wingas Europe est chargée de distribuer du gaz en Europe, à côté de Wingas dont les activités restent majoritairement localisées en Allemagne. Wingas Europe doit permettre à Gazprom de livrer du gaz au Royaume-Uni en passant par le gazoduc BBL qui relie le Royaume Uni au gazoduc Nord Stream. Enfin, en juin 2007, la Commission européenne a permis que la société HydroWingas Ltd (Royaume-Uni), contrôlée conjointement par Norsk Hydro Limited et Wingas GmbH, soit reprise en totalité par Wingas.
  • Gazprom protège ses intérêts en Europe en investissant dans le stockage.

2) Création de communautés d’intérêt à long terme : des consortiums européens

Afin de créer une forme de connivence avec les firmes énergétiques européennes, Gazprom et le Kremlin favorisent la création de consortiums et le développement de relations bilatérales privilégiées avec certains pays membres de l’UE. Dans cette démarche, l’Allemagne est une cible privilégiée et est utilisée comme un cheval de Troie pour entrer dans le marché communautaire. Et Gazprom commence à faire pareil avec la France et l’Italie. Tout cela se fait dans le cadre d’une diplomatie bilatérale qui court-circuite la Commission. L’objectif de Gazprom est de se positionner en bas de la chaîne énergétique pour capter la valeur ajoutée en fournissant les clients finaux sur les marchés domestiques des pays membres de l’Union. L’objectif des énergéticiens européens est de mieux se positionner en haut de la chaîne en accédant aux gisements. Plusieurs consortiums sont déjà constitués ou en voie de l’être :

Le consortium Nordstream

  • Gazprom possède 51% des actions de la société qui doit gérer cette conduite. Les entreprises allemandes E.ON Ruhrgas AG et Wintershall Holding AG, le néerlandais Gasunie et Suez-GDF détiennent le reste du capital.
  • Ce consortium finance la construction du gazoduc transbaltique qui reliera directement l’Allemagne à la Russie. Bien que figurant sur la liste des infrastructures prioritaires établie par un groupe de travail rassemblant des membres de la Commission européenne et des membres de l’administration russe, le projet a abouti grâce à la relation très privilégiée qui existait entre l’ancien chancelier Schröder et le président Poutine. Ce projet a suscité de vives inquiétudes en Pologne et dans les pays Baltes qui se son sentis court-circuités et révèle le poids considérable de l’Allemagne dans la relation énergétique entre l’Union européenne et la Russie.
  • Les avantages sont multiples : c’est bilatéral au détriment d’une relations Russie – UE ; cela crée une collusion entre l’Etat allemand et la Russie car le champion national intégré dans le consortium accède à des ressources en Russie et garantit son approvisionnement (échanges d’actifs) ; la Russie reste majoritaire ; Gazprom accède aux marchés domestiques en aval, là où la valeur ajoutée et les bénéfices sont les plus grands ; les pays impliqués sont assez nombreux pour éviter des réactions de la Commission.

Le consortium South Stream

  • Ce projet doit concurrencer le projet Nabucco ; il implique un plus grand nombre de pays européens que le Nord Stream : l’Italie, la Bulgarie, la Hongrie, la Grèce, la Slovénie et la France, ainsi que la Turquie et la Serbie. L’Autriche semble vouloir se joindre au projet, bien que les pourparlers patinent, et la Roumanie a fait part de son très grand intérêt.
  • Un si grand nombre partenaires a rendu le lancement difficile pour la Russie en démultipliant les négociations. Mais c’est un gain politique et économique à long terme. Si l’Autriche donne son accord, le South Stream sera soutenu par un quart des pays membres de l’Union. Il sera dans ces conditions difficile pour la Commission de ne pas le considérer comme prioritaire. Le premier ministre russe ne s’y pas trompé en déclarant en novembre 2009, lors du bouclage des négociations avec la Slovénie : « La Russie a obtenu le feu vert de tous les partenaires pour le projet South Stream… Nous avons signé aujourd’hui un accord définitif avec tous les partenaires européens en obtenant ainsi l’aval à la pose du gazoduc South Stream… Nous avons effectué un travail immense, des deux côtés… South Stream devient ainsi le grand projet européen ».
  • Les pays de l’Europe du Sud-Est voient dans le South Stream une double sécurité car il est prévu de construire également des sites de stockage sur le territoire de la Hongrie, de la Roumanie et de la Serbie.
  • En promouvant ce tube, Gazprom s’implante sur deux grands marchés de l’Europe de l’ouest.

Dans ce processus fondé sur des actions bilatérales au détriment d’une démarche européenne communautaire, la complicité de nombreux pays européens avec les acteurs russes est évidente :

  • Ceux de l’Europe du sud et sud-est ont le souvenir des coupures de gaz et veulent diversifier leurs itinéraire d’approvisionnement. Le South Stream est donc fortement désiré.
  • Les principaux membres de l’UE ont tout fait pour limiter la portée du 3ème paquet énergétique sur le principe de la séparation patrimoniale (elle nuirait à la stabilité financière du secteur). Le texte voté par le parlement européen au printemps 2009 prévoit trois possibilités : une dissociation intégrale des structures de propriété, un gestionnaire de réseau indépendant, un gestionnaire de transport indépendant.
  • Les grands pays ouest européens cherchent à promouvoir et à protéger leurs champions nationaux. Or ces deniers obtiennent des parts dans des gisements russes de gaz en entrant dans le capital des consortiums et en ouvrant un accès à leur marché domestique à Gazprom (avec l’accord de leur gouvernement). C’est ce qui incite à penser qu’il y a une communauté d’intérêt économique entre les entreprises européennes, certains Etats membres de l’UE, Gazprom et l’administration russe. L’objectif est de sécuriser le flux de gaz et trouver les moyens de rentabiliser les énormes investissements consentis pour son transport et son extraction.
  • Ces initiatives fragilisent le projet de gazoduc Nabucco, porté essentiellement par la Commission européenne, en le rendant inutile. Même si ce tube était construit, il est probable que le Kazakhstan et le Turkménistan ne seraient pas en mesure d’y injecter du gaz. Ces pays vendent en effet la plus grande partie de leur gaz à la Russie qui le fait transiter sur son territoire pour l’expédier vers l’Union européenne.

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Les deux crises gazières russoukrainiennes de 2009 et 20132014

Jusqu’à l’accord du 30 octobre 2014, l’Ukraine était privée du gaz russe depuis juin 2014 à cause de sa dette de 5,3 milliards de dollars. Les précédents datent de 2006 et 2009.

La crise gazière de janvier 2009

Le 31 décembre 2008, la Russie a arrêté de fournir du gaz à l’Ukraine à la suite d’un différend à propos d’un paiement. La Russie a déclaré que l’Ukraine volait pour ses propres besoins du gaz naturel destiné à l’Europe. L’Ukraine a nié l’accusation, mais a répondu qu’elle avait besoin de « gaz technique » pour pomper le combustible à travers le système de gazoduc. Le 6 janvier 2009, les approvisionnements vers la Roumanie, la Grèce, la Macédoine, la Serbie et la Croatie ont été complètement interrompus. Il est apparu que certains pays, y compris la Bulgarie, ne disposaient pas de réserves suffisantes pour compenser une coupure d’approvisionnement.  Le 6 janvier encore, le conflit a laissé l’Europe sans aucun approvisionnement de gaz ukrainien. La Bulgarie a annoncé qu’elle pourrait rouvrir l’un des réacteurs nucléaires de sa centrale de Kozloduy, dont la fermeture avait été l’une des conditions de l’adhésion du pays à l’UE. Elle a été imitée par la Slovaquie quelques jours plus tard.

A ce stade, l’UE a accepté d’envoyer des observateurs pour surveiller l’approvisionnement en gaz destiné à l’Europe. Plusieurs jours de diplomatie téléphonique intense ont suivi, des percées ont été annoncées, mais aucun gaz n’a circulé. Les aspects politiques de l’impasse ont commencé à faire surface, parmi des signes qui montraient l’affaiblissement de la position du président pro-occidental Victor Iouchenko, dont le soutien a baissé jusqu’à 2 %.

Le 17 janvier, au cours d’un « sommet » à Moscou qui a été presque boycotté par l’UE, le Premier ministre Vladimir Poutine et son homologue ukrainienne Yulia Timoshenko ont conclu un accord, déclarant la crise terminée. L’UE a réagi avec prudence.

Selon l’accord, Kiev paiera 20 % de moins pour le gaz russe par rapport au prix du marché européen, soit environ 450 $ les 1000 mètres cubes. Quant à la Russie, elle a déclaré qu’elle continuerait de payer 1,7 dollar américain par 1000 mètres cubes pour chaque 100 kilomètres de gaz acheminé par le biais du système ukrainien de gazoducs. De nombreux observateurs ont considéré que la Russie avait « gagné » la bataille, dans la mesure où les nouveaux termes sont apparus pires que ceux conclus un an auparavant.

Le 20 janvier, les approvisionnements vers l’Europe ont repris. Le président de la Commission, José Manuel Barroso, a salué la reprise des livraisons, après deux semaines d’arrêt qui ont laissé des millions d’Européens de l’Est sans chauffage au milieu de l’hiver. Mais il a également prévenu que des leçons à long terme devraient être tirées de la crise.

 La crise gazière de 20132014

La Russie avait suspendu ses livraisons vers l’Ukraine en juin 2014, en faisant valoir que Kiev n’avait pas honoré des factures de gaz remontant à septembre 2013. Pour relancer les livraisons, les Ukrainiens paieront des arriérés de dette pour un total de 3,1 milliards de dollars (2,4 milliards d’euros). En deux tranches : la première, avant fin novembre (1,45 milliard de dollars) ; la seconde (1,65 milliard de dollars) avant fin décembre. Ces sommes iront dans les caisses de Gazprom, premier producteur de gaz au monde, dont l’Etat russe est actionnaire majoritaire.

Moscou évaluait la dette gazière ukrainienne à un total de 5,3 milliards de dollars, et estime donc avoir fait une concession. Au moins dans un premier temps : Ukrainiens et Russes attendent le verdict d’un tribunal arbitral de Stockholm qui doit trancher sur le prix du gaz russe déjà livré à Kiev.

Le paiement de cette dette rend possible la reprise des livraisons. Les Ukrainiens évaluent leur besoin jusqu’à 4 milliards de mètres cubes de gaz pour reconstituer leurs stocks et passer l’hiver. Les Russes ont accepté de leur vendre à environ 385 dollars les 1 000 mètres cubes. Soit près de 100 dollars de moins que le prix exigé début 2014, après la chute de l’ex-président ukrainien prorusse, Viktor Ianoukovitch. La démission brutale de celui-ci avait incité le Kremlin à brandir, à nouveau, l’arme du gaz comme outil de négociation.

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II . Le marché européen (UE28) du gaz

 Production, consommation et importation de gaz : évolution récente (2013)

  • La production des pays de l’UE ne couvrait que 36 % de la consommation européenne en 2012, contre 38 % en 2008. D’un côté, si la production européenne reste la première source de gaz de l’Union, elle décline régulièrement depuis 2004, l’année du pic, avec la déplétion des champs gaziers de la mer du Nord, notamment ceux du Royaume-Uni qui a chuté de 38 % en trois ans : 2010 :193 ; 2011 : 181,4 ; 2012 :168,7 ; 2013 :167,4. NB Certains États membres, notamment la Pologne, mènent actuellement des études exploratoires en vue d’exploiter le gaz de schiste. Mais des facteurs tels que les coûts liés à production, l’impact sur l’environnement, la taille des réserves et un développement technologique inadapté pourraient empêcher l’UE d’avoir une production conséquente en gaz de schiste avant 2030 ;
  • En même temps, la baisse de consommation est continue depuis 2011 (-10% en 2011, – 2% en 2012, -1,4% en 2013, à 462 Mm³). Cette diminution est amoindrie du fait de la fermeture des 17 centrales nucléaires allemandes (8 réacteurs les plus anciens ont été arrêtés, 6 doivent l’être graduellement d’ici à 2021 et les 3 derniers en 2022). Les trois objectifs de l’accord auquel est parvenu le Conseil européen les 23-24 octobre 2014 sur le « paquet climat-énergie 2020-2030 »), vont faire baisser fortement la dépendance aux énergies responsables des émissions carbonées d’ici à 2030 (réduction des émissions européennes de gaz à effet de serre d’au moins 40 % d’ici 2030 par rapport à 1990 ; élever la part des énergies renouvelables à 27 % du « mix énergétique » ; réduire la consommation d’énergie dans l’Union d’au moins 27 %) ;
  • Au total, des importations en augmentation. En % : venant de Russie : 44, de Norvège : 33, d’Algérie : 10,8 et du Qatar : 7,4, soit 95,2 % et divers : 4,8 (Nigéria, Libye, Trinidad & Tobago, Pérou). Sce : BP.

En 2013, 31% du gaz européen a été importé (dont 27% de gaz russe, autres : 4 %), contre 27 % en 2012 (russe : 23 %). Cette part représente environ 45 % des exportations de gaz russe. Il est acheminé directement, via Nord Stream, et par transit à travers l’Ukraine et la Biélorussie. Les principaux importateurs sont l’Allemagne et l’Italie. Des clients moins importants : la Tchéquie, la France et la Hongrie. La part de la Norvège est passée de 22% à 23% entre 2012 et 2013, tandis que l’Algérie a vu sa part baisser de 9 à 8%. Le Qatar, qui envoie du gaz sous sa forme liquéfiée (GNL), n’a représenté que 4% l’an passé, contre 6% en 2012.

L’UE dépend des importations pour plus de 60 % de son gaz et en dépendra jusqu’en 2020, malgré ses efforts pour basculer vers une économie décarbonée.

  1. Par ailleurs, en 2013, la Russie a livré à l’Europe 178 millions de tonnes de pétrole, environ 38 % des importations européennes et environ 38 millions de tonnes de carburant diesel, soit 86 % des importations européennes. Selon la Commission européenne et Gazprom, celle-ci a acheminé cette même année 133 MMm3 de gaz vers l’UE, soit 16,2% de plus que l’année précédente. La part de Gazprom sur le marché européen est passée de 25,6 % en 2012 à 30% en 2013.

Les instruments de la politique européenne de l’énergie (textes et structures)

1) Textes, vers un agenda européen en matière de sécurité énergétique

Dans le contexte institutionnel créé par les Traités européens, la gestion des ressources de gaz et de pétrole est restée toujours du domaine de compétences des Etats. Le Traité européen ne reconnaît pas de compétence directe de politique énergétique à l’Union européenne.

11 Le Traité sur la Charte, précédé par la « Charte européenne de l’énergie » adoptée en 1991, a été signé en 1994 (entré en vigueur en 1998) par tous les États membres de l’Union européenne et les pays candidats, ainsi que par l’ensemble des pays de la CEI, dont la Russie, le Japon et la Suisse, mais pas par les États-Unis et le Canada.

L’objectif de ce traité est d’établir un cadre de coopération internationale entre les pays d’Europe et d’autres pays industrialisés, notamment dans le but de développer le potentiel énergétique des pays d’Europe centrale et orientale et d’assurer la sécurité des approvisionnements énergétiques de l’Union européenne.

Les dispositions les plus importantes du traité concernent la protection des investissements contre les nationalisations arbitraires, le commerce des matières et produits énergétiques pour lequel chaque État s’engage à appliquer les règles de l’OMC, le transit et le règlement des différends, pour lesquels le traité prévoit des procédures particulièrement rigoureuses. Il est complété par des protocoles sur l’efficacité énergétique et sur le transit.

Le traité a été ratifié par la plupart des pays signataires, à l’exception de la Russie, de la Biélorussie et de la Norvège.

Les autorités russes ont affirmé à de multiples reprises qu’elles ne ratifieront pas le traité sur la Charte de l’énergie, qui entraînerait la fin du monopole de Gazprom sur les exportations de gaz naturel, notamment en provenance du Turkménistan. En revanche, elles ont toujours affirmé qu’elles étaient disposées à accepter de négocier sur les principes contenus dans cette Charte, qu’elles estiment d’ailleurs appliquer en pratique.

12 Traité instituant la Communauté de l’énergie (entrée en vigueur : 1er juillet 2006)

Membres : outre l’UE, les 11 parties contractantes (entrées entre 2006 et 2013) sont : Albanie, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Croatie, Kosovo, Macédoine, Moldavie, Monténégro, Roumanie, Serbie, Ukraine. L’Arménie, la Géorgie, la Norvège et la Turquie ont le statut d’observateur.

L’objectif est de renforcer le pouvoir de négociation de l’UE par rapport aux pays producteurs de pétrole et de gaz. Le traité instituant la Communauté de l’énergie s’appuie principalement sur la mise en œuvre d’aspects essentiels de la législation de l’UE dans les domaines de l’électricité et du gaz (y compris la sécurité de l’approvisionnement), de l’environnement, de la promotion des énergies renouvelables, de l’efficacité énergétique et des biocarburants, ainsi que de la politique de concurrence de l’UE.

13 Les programmes d’action successifs (packages ou « paquets »)

  • Le « premier paquet énergie » adopté en 1996 pour le marché intérieur de l’électricité (directive 96/92/CE) et en 1998 pour le marché intérieur du gaz naturel (directive 98/30/CE).
  • Le deuxième paquet énergie (Sommet de Lisbonne, mars 2000) exprime la volonté « d’accélérer la libéralisation dans des secteurs tels que le gaz et l’électricité ». L’ouverture sera complète pour tous les clients au plus tard le 1er juillet 2007. La directive 2003/55/CE définit les règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel.
  • Le troisième paquet énergie (adopté le 13 juillet 2009) concerne notamment, dans le domaine du gaz et celui de l’électricité :
  1. la séparation effective entre la gestion des réseaux de transport d’une part, et les activités de fourniture et de production d’autre part. Cette séparation doit permettre une meilleure concurrence en évitant qu’un opérateur prenne le contrôle de l’ensemble de la chaîne de production et de distribution ;
  2. la surveillance réglementaire et la coopération entre régulateurs, notamment par la création d’une Agence de coopération des régulateurs nationaux de l’énergie afin de favoriser l’interconnexion des marchés énergétiques, qui doit permettre d’accroître la sécurité d’approvisionnement en cas de surcharge ou d’incident sur un marché national ;
  3. la coopération entre les gestionnaires de réseau (ENTSOG : European Network of Transmission System Operator of Gas) ;
  4. la transparence et la conservation des données ;
  5. l’accès aux installations de stockage et de GNL.
  6. L’harmonisation progressive des cadres techniques et juridiques en vigueur dans les différents Etats membres ;
  7. Des dispositions précisant les règles minimales devant être mises en œuvre par les Etats en matière de protection des consommateurs.

Le 3ème paquet comprend cinq directives (création d’une Agence de coopération des régulateurs de l’énergie ; échanges transfrontaliers d’électricité ; conditions d’accès aux réseaux de transport de gaz naturel ; règles communes pour le marché intérieur de l’électricité ; règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel).

 14 Sécurité d’approvisionnement énergétique de l’UE et coopération internationale

Une communication de la Commission en date du 7 septembre 2011 définit la stratégie de coopération au-delà des frontières de l’Union européenne afin d’assurer son approvisionnement énergétique et de promouvoir ses objectifs dans le domaine d’énergie.

Cette stratégie se fonde sur quatre objectifs principaux :

  • développer la dimension internationale du marché intérieur de l’énergie de l’UE;
  • renforcer les partenariats pour une énergie sûre, durable et compétitive;
  • faciliter l’accès des pays en développement aux énergies durables;
  • mieux promouvoir les politiques de l’UE au-delà des frontières.

Objectif 1 : développer le marché intérieur de l’énergie de l’UE

La Commission européenne souhaite établir un mécanisme d’échange d’informations sur les accords intergouvernementaux entre États membres et pays tiers afin d’améliorer la coordination dans le marché intérieur de l’énergie. Des accords pouvaient également être passés au niveau de l’UE avec les pays tiers.

Il est primordial pour l’UE de diversifier ses sources énergétiques afin d’assurer la continuité de son approvisionnement. L’UE a donc l’intention de mettre en place des mesures de suivi afin de:

  • assurer la continuité de la construction des infrastructures définies dans la stratégie «Priorités en matière d’infrastructures énergétiques pour 2020 et au-delà» ;
  • privilégier l’approvisionnement en provenance du corridor sud-européen;
  • assurer l’apport continu de gaz et de pétrole provenant de l’Est grâce à une coopération avec la Russie et l’Ukraine, tout en soutenant la modernisation du réseau ukrainien de transport ;
  • développer des projets en matière d’énergie renouvelable avec les pays du Sud de la Méditerranée.

La Commission estime nécessaire d’établir des types de coopérations différenciées adaptées à chaque partenaire. Elle compte ainsi mettre en œuvre plusieurs projets dont les principaux visent à:

  • conclure des négociations avec la Suisse dans le but d’intégrer complètement les marchés de l’électricité;
  • stimuler la coopération avec les États qui souhaitent adhérer à l’UE;
  • concevoir un partenariat euro-méditerranéen qui privilégierait l’électricité et les énergies renouvelables d’ici à 2020.

Objectif 2 : renforcer les partenariats pour une énergie sûre, durable et compétitive

Hormis la Russie, l’UE est tenue d’une part, de renforcer ses partenariats avec ses fournisseurs d’hydrocarbure, tels que la Norvège, l’Algérie, l’Arabie Saoudite ou la Libye, et d’autre part, d’engager de nouveaux dialogues avec des producteurs émergents. Il est crucial de mettre l’accent sur la bonne gouvernance énergétique.

Dans le cadre de ses coopérations, l’UE ne doit pas perdre de vue l’objectif de réduire les émissions de carbone à l’échelle mondiale. Elle se propose ainsi d’inviter les pays industrialisés et émergeants à travailler sur la création de marchés mondiaux de l’énergie transparents et prévisibles, sur la promotion de l’efficacité énergétique et des énergies à faibles émissions de carbone, et sur des projets de recherche et d’innovation dans ce domaine.

L’UE considère qu’il est impératif d’accélérer les travaux relatifs à un environnement juridique complet en ce qui concerne ses relations avec ses fournisseurs et les pays de transit. Pour ce faire, elle soutient activement la Charte de l’énergie, et particulièrement les travaux sur ses mandats fondamentaux en matière de commerce, de transit et d’investissement.

La Commission souhaite également promouvoir les normes de sûreté et de sécurité nucléaire au niveau mondial. Dans cette optique, elle compte étendre le champ d’application des accords Euratom et préconiser des normes internationales de sûreté nucléaire juridiquement contraignantes, notamment au niveau de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).

Elle entend également soulever la question de la sécurité de l’exploitation offshore y compris avec les producteurs d’hydrocarbures au sein de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP).

Objectif 3 : faciliter l’accès des pays en développement aux énergies durables

Dans sa politique de développement, la Commission s’est fixé pour but de rendre les sources d’énergie (électricité notamment) accessibles aux régions les plus démunies, tout en respectant les impératifs environnementaux. Pour atteindre ces objectifs, elle souhaite intégrer les questions énergétiques dans tous les instruments de la politique de développement de l’UE, et faciliter l’accès des pays les moins développés au financement de la lutte contre le changement climatique.

Objectif 4 : mieux promouvoir les politiques de l’UE au-delà de ses frontières

La Commission a défini quatre types de partenaires énergétiques :

  • les partenaires d’intégration du marché;
  • les principaux fournisseurs et les pays de transit;
  • les principaux acteurs mondiaux;
  • les pays en développement.

Pour chacun de ces partenaires, elle propose l’utilisation des instruments appropriés parmi les instruments juridiques et politiques existants, par exemple le traité instituant la Communauté de l’énergie, les dialogues stratégiques en matière d’énergie ou autres instruments.

La Commission souhaite également améliorer la coordination entre États membres afin de parler d’une seule voix hors de ses frontières. Pour ce faire, elle compte instituer un groupe stratégique pour la coopération internationale en matière d’énergie.

Afin d’optimiser le suivi de ses projets, la Commission va mettre en place un projet de base de données en matière d’énergie, mené dans des pays partenaires et financés par l’UE, les États membres de l’UE, la Banque européenne d’investissement (BEI) et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD).

 15 L’article 194 du Traité sur le fonctionnement de l’UE (octobre 2012). Voir in extenso ci-dessous.

  • pose le fondement d’une politique européenne de l’énergie sur le fonctionnement du marché de l’énergie (des mesures devraient être mises en œuvre « pour développer les échanges de gaz et de courant électrique propres à augmenter la rentabilité des investissements et à réduire le coût des fournitures » et « pour coordonner les perspectives communes de développement de la production et de la consommation d’énergie et pour dresser les lignes générales d’une politique d’ensemble »),
  • sur la sécurité de l’approvisionnement énergétique,
  • sur l’efficacité énergétique, leséconomies d’énergie et les énergies nouvelles et renouvelables,
  • et enfin, sur l’interconnexion des réseaux.

Dans le même temps, il rappelle que les État membres sont libres dans la détermination de leur bouquet énergétique et de leurs sources d’approvisionnement ainsi que dans l’exploitation de leurs ressources énergétiques.

Texte inextenso de l’article 194, Titre XXI, Énergie

  1. Dans le cadre de l’établissement ou du fonctionnement du marché intérieur et en tenant compte de l’exigence de préserver et d’améliorer l’environnement, la politique de l’Union dans le domaine de l’énergie vise, dans un esprit de solidarité entre les États membres :
  2. a) à assurer le fonctionnement du marché de l’énergie;
  3. b) à assurer la sécurité de l’approvisionnement énergétique dans l’Union;
  4. c) à promouvoir l’efficacité énergétique et les économies d’énergie ainsi que le développement des énergies nouvelles et renouvelables; et
  5. d) à promouvoir l’interconnexion des réseaux énergétiques.
  6. Sans préjudice de l’application d’autres dispositions des traités, le Parlement européen et le Conseil, statuant conformément à la procédure législative ordinaire, établissent les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs visés au paragraphe 1. Ces mesures sont adoptées après consultation du Comité économique et social et du Comité des régions.

Elles n’affectent pas le droit d’un État membre de déterminer les conditions d’exploitation de ses ressources énergétiques, son choix entre différentes sources d’énergie et la structure générale de son approvisionnement énergétique, sans préjudice de l’article 192, paragraphe 2, point c).

  1. Par dérogation au paragraphe 2, le Conseil, statuant conformément à une procédure législative spéciale, à l’unanimité et après consultation du Parlement européen, établit les mesures qui y sont visées lorsqu’elles sont essentiellement de nature fiscale.

Structures

Outre la Communauté de l’énergie, l’UE met en œuvre différentes initiatives régionales en direction des voisins orientaux riverains de la mer Noire et de la mer Caspienne. Ces pays sont censés aligner à terme leur législation sur l’acquis européen.

 La Communauté de l’énergie (2008) regroupe, afin de créer un marché intégré de l’énergie, l’UE et les États voisins (Albanie, Bosnie-Herzégovine, Ancienne République yougoslave de Macédoine, Monténégro, Serbie, la Mission d’administration intérimaire des Nations unies au Kosovo, Moldavie (2010), Ukraine (2011), Croatie (2013). L’Arménie, la Géorgie, la Norvège et la Turquie ont un statut d’observateur.

Organismes multinationaux

Depuis plusieurs années, est apparu un paysage complexe de groupements entre pays des marges communes à l’Europe de Bruxelles et à la Communauté des États indépendants (CEI) – représentée en fait par la Russie. À des degrés divers, ces pays souhaitent trouver leur place en Europe pour des raisons qui tiennent autant à des questions d’identité que de stratégie. Leur inconfort est le fruit de deux décennies de profonds changements sociaux, concomitants à une réorganisation géopolitique du continent et à l’attraction qu’exercent sur eux les modèles rivaux des Etats-Unis, des pays européens et de la Russie, en attendant l’arrivée de la Chine.

Le Triangle de Weimar

Le Triangle de Weimar (1991), un forum de rencontre, de dialogue et d’échange informel, définit la coopération trilatérale entre la France, l’Allemagne et la Pologne. L’initiative en revient au ministre des Affaires étrangères allemand Hans-Dietrich Genscher.

La création du Triangle de Weimar exprime tout d’abord la volonté d’associer la France à la réconciliation germano-polonaise, en s’inspirant de l’expérience exemplaire de réconciliation franco-allemande. Il s’agissait de ne pas laisser l’Allemagne et la Pologne dans un face à face conflictuel stérile et d’orienter aux mieux leur démarche de bon voisinage.

Le Triangle devait permettre de soutenir activement le rapprochement de la Pologne au système de sécurité transatlantique de l’OTAN et de préparer au mieux sa future adhésion à l’Union européenne. Ces deux objectifs furent couronnés de succès : la Pologne intègre l’OTAN en 1999 et adhère à l’UE en 2004. Depuis l’entrée de la Pologne dans l’UE, le Triangle de Weimar est devenu un cadre privilégié de concertation et de renforcement du dialogue politique et de la coopération entre les trois États. Le Triangle de Weimar ne joue a priori aucun rôle spécifique en matière d’énergie.

Le groupe de Visegrád (V4)

Le groupe de Visegrád (1991), comprend la Hongrie, la Pologne, la République tchèque et la Slovaquie. Initialement conçu comme une structure de soutien mutuel pour l’intégration européenne d’une région fraîchement affranchie de la tutelle soviétique, le groupe a survécu à l’adhésion des quatre pays à l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) et à l’Union européenne, pour évoluer en un forum intergouvernemental. A défaut d’institutions permanentes, il dispose d’une présidence tournante annuelle, ainsi que du Fonds international de Visegrád. Doté de 7 millions d’euros en 2012, celui-ci alloue des bourses d’éducation ainsi que des subventions artistiques et culturelles.

La coopération des V4 concerne des domaines précis, tels que l’éducation ou la défense. En mars 2013, la création d’une force militaire d’intervention forte de trois mille hommes, opérationnelle d’ici à 2016, a été annoncée. Il s’agit d’une initiative conjointe avec le triangle de Weimar, qui regroupe la France, l’Allemagne et la Pologne. Les efforts de constitution d’un espace énergétique régional demeurent toutefois quasi nuls.

La politique européenne de voisinage (PEV) a été mise en place en 2004 afin d’éviter l’émergence de nouvelles lignes de division entre l’Union élargie et ses voisins, ainsi que pour renforcer la prospérité, la stabilité et la sécurité de tous. Cette politique s’appuie sur les valeurs qui sont celles de la démocratie, de l’état de droit et du respect des droits de l’homme, et elle s’applique à 16 des voisins les plus proches de l’Union, à savoir l’Algérie, l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, l’Égypte, la Géorgie, Israël, la Jordanie, le Liban, la Libye, le Maroc, la Moldavie, la Palestine, la Syrie, la Tunisie et l’Ukraine. La PEV est essentiellement une politique bilatérale entre l’Union et chaque pays partenaire. Elle est enrichie par des initiatives de coopération régionale : le partenariat oriental et l’Union pour la Méditerranée

Deux projets d’intégration mutuellement exclusifs, le Partenariat oriental et l’Union douanière Russie-Biélorussie-Kazakhstan.

Le Partenariat oriental, accord d’association conclu en mai 2009 entre l’UE et deux ensembles géographiques distincts : d’un côté, l’Europe orientale, dont une partie des frontières sont celles des Etats membres de l’UE (Lettonie, Lituanie et Pologne pour la Biélorussie, Pologne, Slovaquie, Hongrie et Roumanie pour l’Ukraine, Roumanie pour la Moldavie), et de l’autre, les Etats du Caucase du Sud (Azerbaïdjan, Arménie et Géorgie), qui n’ont pas de frontières terrestres avec les 28. NB. À elle seule, l’Ukraine représente les trois cinquièmes de la superficie et de la population cumulées des six partenaires orientaux. L’initiative revient à la Suède et à la Pologne, une réponse stratégique au projet français d’Union pour la Méditerranée (2008). Le Partenariat Oriental permet aux pays partenaires intéressés de se rapprocher de l’UE en renforçant leurs liens politiques, économiques et culturels avec elle. Trois Etats ont montré des velléités de rapprochement avec l’UE, déclarant jusqu’à vouloir une adhésion : la Géorgie, l’Ukraine et la Moldavie. Néanmoins, les évolutions sont contrastées au cours du temps, au gré des alternances politiques et du succès à mener des réformes ambitieuses sur le plan interne. L’Arménie a entrepris un certain nombre de réformes négociées avec l’UE, mais elle a fait part de son souhait de rejoindre l’Union eurasienne. La Biélorussie et l’Azerbaïdjan se servent des acteurs européens essentiellement pour disposer de davantage d’autonomie vis-à-vis de Moscou. L’Union Européenne individualise sa relation juridique avec chacun des Etats partenaires, dans une logique de rapprochement bilatéral. Outre la démocratie et l’intégration économique, la sécurité énergétique est une des plateformes de l’accord. Des aides sont versées dans ce cadre (300 M€ pour l’Ukraine).

La question énergétique, si elle est essentielle dans tous les pays concernés, se pose selon des modalités différentes. Ces pays sont globalement marqués par une faible efficacité énergétique, et l’importance du gaz dans le mix énergétique, à l’exception de la Géorgie. Ce dernier point est important si l’on se souvient des particularités du marché du gaz, dont le fonctionnement est régional et requiert en outre des investissements importants. Leur position sur le marché diffère : l’Azerbaïdjan est un pays producteur de gaz important, tandis que l’Ukraine et la Biélorussie apparaissent comme des pays de transit essentiels pour l’UE, et la Géorgie dans une moindre mesure. Ce dernier pays présente la spécificité de s’être détourné du gaz russe depuis 2006, en réorientant sa politique étrangère vers l’Azerbaïdjan qui lui est autonome de ce point de vue, et entend en profiter dans sa politique étrangère, tant avec la Russie qu’avec l’UE.

La Dimension septentrionale (nordique) est un programme de l’UE visant une coopération transfrontalière entre les États du nord de l’Europe au sens large : les États membres de l’Union comme la Suède, la Finlande, le Danemark (ainsi que le Groenland) et les États baltes, d’une part, et la Norvège, l’Islande et la Russie, d’autre part. Sont également associés : Conseil de l’Arctique, Conseil euro-arctique de Barents, Conseil des États de la mer Baltique et Conseil nordique des ministres ;

– des institutions financières internationales ; des universités, des centres de recherche et des représentants du monde des affaires ; le Canada et les États-Unis en qualité d’observateurs. La Pologne et l’Allemagne sont également directement concernées à l’occasion. La coopération concrète  (à laquelle participe la Biélorussie)  porte sur 4 thèmes : environnement, transports, santé, culture.

L’initiative, lancée par la Finlande en 1997 (inaugurée en 1999 et renouvelée en 2006), fait pendant au partenariat euro-méditerranéen (28+15 pays, stabilité et prospérité) datant de 2008. Helsinki inscrit ensuite cette initiative dans le cadre des politiques européennes, le soutien politique et financier de l’UE créant les conditions les plus favorables à son succès

 INOGATE

INOGATE est l’un des plus anciens programmes d’assistance technique en énergie financés par l’Union européenne. Il a débuté en 1996 et s’inscrit dans les cadres politiques de l’Initiative de Bakou et du Partenariat oriental.

INOGATE coopère avec 11 pays partenaires pour soutenir une réduction de leur dépendance à l’égard des combustibles fossiles et des importations, améliorer la sécurité de leur approvisionnement énergétique et atténuer le changement climatique global.

Les pays partenaires d’INOGATE sont situés dans 3 régions géographiques et soutenus par 3 secrétariats régionaux d’INOGATE :

  • Europe de l’Est : Biélorussie, Moldova et Ukraine ; secrétariat à Kiev ;
  • Caucase : l’Arménie, l’Azerbaïdjan et la Géorgie ; secrétariat à Tbilissi ;
  • Asie centrale : Kazakhstan, Kirghizistan, Tadjikistan, Turkménistan et Ouzbékistan ; secrétariat à Tachkent.

Le programme INOGATE a quatre objectifs :

  • Convergence des marchés de l’énergie sur la base des principes du marché intérieur de l’énergie de l’UE en tenant compte des particularités des pays partenaires
  • Améliorer la sécurité énergétique en abordant les questions d’exportations et d’importations d’énergie, de diversification de l’offre, de transit énergétique et de demande énergétique
  • Appuyer le développement de l’énergie durable, y compris le développement de l’efficacité énergétique, l’énergie renouvelable et la gestion de la demande
  • Attirer les investissements vers des projets énergétiques d’intérêt commun et régional.

Le programme INOGATE est piloté par la Commission européenne et les ministères chargés de l’énergie dans chacun des pays partenaires. INOGATE apporte son aide dans le cadre d’une série de projets visant à résoudre des problèmes spécifiques liés à la réalisation de ses objectifs. Les activités précises de tous les projets INOGATE sont reflétées dans son programme de travail annuel, adopté par son comité directeur composé de représentants de la CE et de coordonnateurs de pays représentant les pays partenaires. A ce jour, INOGATE a réalisé avec succès 70 projets.

 L’Initiative de Bakou

L’Initiative de Bakou a été amorcée le 13 novembre 2004, à l’occasion de la Conférence ministérielle de l’énergie à Bakou avec la participation de la Commission européenne, les pays riverains de la Mer Noire et de la Mer Caspienne et de leurs pays voisins. Il s’agissait des pays suivants : l’Azerbaïdjan, l’Arménie, la Bulgarie, la Géorgie, le Kazakhstan, le Kirghizstan, la Moldavie, la Roumanie le Tadjikistan, la Turquie, l’Ukraine et l’Ouzbékistan. L’Iran et la Russie étaient présents en qualité d’observateurs.

Les pays participants ont abouti à un accord sur leurs objectifs respectifs relatifs au renforcement du développement graduel des marchés régionaux dans les états Caspiens et leurs pays voisins, l’amélioration du climat d’investissement dans les nouvelles infrastructures, la stimulation mondiale de l’efficacité énergétique, l’utilisation des sources énergétiques renouvelables et la promotion de l’intégration poursuivie des marchés énergétiques de la Région Caspienne dans le Marché européen.

Le but de « l’initiative de Bakou » est de faciliter le transport de pétrole et de gaz de la région de la Mer Caspienne vers l’Europe. Le transport peut se faire via la Russie ou d’autres pays de transit tels que l’Iran ou la Turquie et il est important pour la diversification de sources énergétiques, origine géographique et voies de transit. Ce procès est également important pour l’obtention de prix concurrentiels, ainsi que pour la promotion du développement économique, social et politique de la Région de la mer Caspienne.

Afin d’aboutir à un renforcement entre les pays participants et l’UE, plusieurs groupes d’experts ont été mis en place (amélioration de l’organisation d’un marché harmonisé d’hydrocarbures et d’électricité ; amélioration de la sécurité de la production d’énergie, du transport et des livraisons ; stimulation de l’efficacité énergétique par l’utilisation de sources énergétiques renouvelables, l’utilisation rationnelle d’énergie et l’utilisation rationnelle de la production, le transport et l’utilisation d’énergie ; la promotion des investissements dans des projets énergétiques d’importance commune).

Le secrétariat technique INOGATE sert de mécanisme de coordination au soutien de la coopération énergétique, dans le cadre de l’Initiative de Bakou.

 Une série de mémorandum de coopération

 Dans le domaine spécifique de la sécurité d’approvisionnement énergétique, les relations bilatérales avec les pays tiers sont encadrées par une série de mémorandum de coopération. Accord sur les installations nucléaires (cf.  Tchernobyl) et la réhabilitation du réseau de transit de gaz avec l’Ukraine ; mémorandum de coopération énergétique avec la Moldavie, le Kazakhstan et le Turkménistan ; partenariat stratégique avec l’Azerbaïdjan ; coopération renforcée avec l’Ouzbékistan et la Région Caspienne. Cette dernière se trouve formalisée avec les pays riverains de la Mer Noire et de la Mer Caspienne et de leurs pays voisins, dans l’initiative de Bakou, novembre 2004 (participants : Arménie, Azerbaïdjan, Bulgarie, Géorgie, Kazakhstan, Kirghizstan, Moldavie, Ouzbékistan, Roumanie, Tadjikistan, Turquie, Ukraine ; UE ;  observateurs : Iran et Russie) dont le but est de faciliter le transport de pétrole et de gaz de la région de la Mer Caspienne vers l’Europe, via la Russie ou l’Iran ou la Turquie.

 NB. Différents accords ont été signés avec des pays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, notamment avec les deux fournisseurs les plus importants de la région : Algérie et l’Égypte. En outre : soutien à la politique régionale de la Jordanie afin de faciliter le futur transit gazier vers l’UE.

Les firmes : vers une plateforme de capacités européenne commune

Amsterdam, avril 2012

Seize des principaux gestionnaires de réseaux de transport ont pris l’initiative de rassembler leurs efforts et leur grande expérience dans le domaine des plateformes de réservation de capacités pour s’orienter vers une plateforme de capacités européenne commune.

Cette alliance est formée par des gestionnaires de réseaux belges, danois, français, allemands et néerlandais. Lors de la conférence FLAME, des représentants de haut rang de cette initiative ont signé aujourd’hui un protocole d’accord définissant les modalités de cette nouvelle plateforme de capacités pour respecter les futures conditions du marché européen. Ces conditions sont décrites dans le Code de réseau CAM (Capacity Allocation Mechanism), actuellement en cours de finalisation au niveau européen.

« Notre alliance, visant à fournir une plateforme de capacités commune, constitue une avancée majeure sur la voie d’un marché gazier européen intégré, comme le prévoit le troisième paquet énergie de l’Union européenne », ont annoncé aujourd’hui les GRT participants. « Cette nouvelle initiative regroupe les marchés gaziers de cinq différents pays clés d’Europe. Elle ouvre ainsi de nouvelles possibilités pour le transport de gaz transfrontalier aux utilisateurs de réseau, qui pourront alors réserver des capacités aux points d’interconnexion des réseaux européens grâce à un seul outil. »

Pour Günther Öttinger, Commissaire européen chargé de l’énergie, « il s’agit d’un premier pas prometteur vers un marché gazier unique interne à l’Europe. La mise aux enchères de capacité « bundlée » (groupée ou, en paquet) est un point essentiel du Code de réseau et je suis heureux de voir les GRT déterminés à mettre cela en œuvre ».

L’objectif est de rendre cette plateforme opérationnelle d’ici avril 2013. Elle pourra traiter différents produits de capacité, proposer des mécanismes d’enchères et fonctionnera avec les différents systèmes de back-end des GRT. Cette plateforme aura également une fonction de marché secondaire.

Cette initiative concentre les activités des plateformes existantes de tous les GRT participants. Leur vaste savoir-faire couvre l’exploitation de quatre plateformes existantes en Europe :

  • Capsquare,
  • Eucabo,
  • Link4Hubs,
  • TRAC-X.

Les partenaires de cette nouvelle société commune seront :

 Institutions et organes de l’UE concernés par l’énergie

  • Parlement européen
  • Conseil de l’Union européenne
  • Commission européenne
  • Comité économique et social européen
  • Comité des régions
  • Banque européenne d’investissement
  • Agences de l’UE
      • Agence d’approvisionnement Euratom
      • Entreprise commune européenne pour ITER et le développement de l’énergie de fusion («Fusion for Energy»)
      • Agence exécutive pour les petites et moyennes entreprises

 Commission européenne, les responsables en charge de l’énergie

 Commissaire Climat et énergie : Miguel ARIAS CAÑETE — Espagne

Agé de 64 ans, ancien procureur et professeur de droit européen, Miguel Arias Cañete fut successivement député européen, puis deux fois ministre de l’Agriculture. Entre ses mandats électifs, il fut président du conseil d’administration d’entreprises pétrolières. Ses intérêts dans l’industrie pétrolière, tout comme sa personnalité, ont été scrutés de près lors de son audition devant le Parlement.

Vice-Président pour l’énergie de l’Union : Maroš ŠEFČOVIČ –  Slovaquie

Diplômé en économie et en droit à l’Université de Bratislava, Maroš Šefcovic intègre l’Institut d’État des relations internationales de Moscou entre 1985 et 1990. Il étudie ensuite un an à Standford (Etats-Unis) avant de revenir se spécialiser en Affaires européennes et internationales dans son pays. D’abord conseiller du vice-ministre des Affaires étrangères, il devient secrétaire et consul à l’ambassade de la République fédérale tchèque et slovaque du Zimbabwe, puis à l’ambassade d’Ottawa pour enfin être ambassadeur à Tel Aviv. Diplomate polyglotte, il a été Représentant Permanent de la Slovaquie auprès de l’UE et Ambassadeur de la représentation permanente de la Slovaquie à Bruxelles. Il s’agit de son troisième mandat à la Commission européenne.

 Le degré de dépendance des pays de l’UE à l’égard du gaz russe

(Source : Eurostat, 2011)

 Données en % de la consommation brute de gaz naturel par pays.

  • 100 % ou proche : huit pays : les trois pays baltes, la Finlande, la République tchèque et la Slovaquie, Autriche (98,3 %) et Bulgarie (95,7 %) ;
  • au-dessus de 50 % : trois pays : Grèce (65,5 %), Slovénie (53,2 %) et Hongrie (51 %) ;
  • entre 20 et 50 % : quatre pays : Allemagne (41,6 %), Italie (28,2 %), Luxembourg (26,6 %) et Roumanie (21,2 %) ;
  • peu dépendants (<20 %) : deux pays : France (16,9 %) et Pays-Bas (4,7 %) ;
  • indépendants (0 % ou <1 %) : dix pays : Belgique, Royaume-Uni, Suède, Pologne, Danemark, Irlande, Espagne, Portugal, Croatie, Chypre.

Deux pays recevaient près de la moitié (48 %) du gaz russe importé par l’UE : l’Allemagne (29,6 %) et Italie (18,3 %)

Le degré de loyauté des pays européens à l’égard de la Russie

(étude de Stefano Braghiroli et Caterina Carta)

Une étude réalisée par Stefano Braghiroli et Caterina Carta (The EU’s attitude towards Russia: condemned to be divided? An analysis of the Member States and Members of the European Parliament’s preferences) a classé les pays de l’UE selon leur degré de loyauté à l’égard de la Russie.

  • le camp antirusse regroupe la Grande-Bretagne, la Suède, la Pologne, la Roumanie et les pays baltes. A une extrême se trouvent les pays d’Europe de l’Est qui font partie de l’ex-bloc communistes et qui sont aujourd’hui, pour la plupart, hostiles à Moscou : l’Estonie, la Lituanie, la Pologne, la Lettonie, la République tchèque et la Slovaquie.
  • camp prorusse. Pour leur part, l’Italie et la Hongrie peuvent être considérées comme faisant partie de ce camp. A l’autre extrême se trouvent les pays loyaux, qui maintiennent de bonnes relations avec la Russie : l’Italie, l’Autriche et la Grèce.
  • Entre les deux, il y a les pays qui critiquentprudemment : la Roumanie, la Slovénie, la Suède, la Bulgarie, la Hongrie et le Royaume-Uni.
  • Enfin, il y a groupe des partenaires qui acquiescent, le plus important. Celui-ci comprend la Belgique, le Danemark, la Finlande, la France, l’Allemagne, l’Irlande, le Luxembourg, les Pays Bas, le Portugal et l’Espagne. 
  • Toujours imprévisible, l’Allemagne tient la clé de ce qui deviendra, soit un nouveau rideau de fer, soit un virage vers l’est. Tout dépend de l’Ukraine. Si sa finlandisation fonctionne, en laissant une autonomie substantielle aux régions, comme Moscou le propose.

***

 III . Le marché asiatique (Asie4)

 Le marché asiatique et son avenir

Tendance générale : selon les experts, la demande de gaz en Asie hors Japon, avec les deux poids lords que sont la Chine et l’Inde, pourrait augmenter de 65% d’ici à 2035, les pays de l’OCDE (Etats-Unis, Europe et Japon) ne représenteront que 4% de la hausse des besoins. En 2020, la consommation du Japon, de la Corée du Sud et de la Chine pourrait représentera 50 % de la consommation énergétique mondiale.

NB Le prix du gaz vendu à l’Asie est le double de celui pratiqué sur le Vieux Continent (600 à 700 dollars les mille mètres cubes).

Chine

Selon certains experts, la consommation de gaz en Chine pourrait tripler et dépasser l’ensemble du marché européen dans les 15 ans à venir. Pékin ayant décidé d’augmenter la part de gaz dans le mix énergétique national de 5% à 30% en quelques années, l’importation, tant de Russie que d’Asie centrale et la production chinoise, elle-même en augmentation, seront à peine suffisantes pour répondre aux besoins. Elle produit 110 Mm3 par an et manque de 50 à 55. Le pays reçoit actuellement le gaz de deux sources extérieurs. La Birmanie (près de 10 Mm3 par an), et le Turkménistan (environ 26 Mm3 par an ; en 2011, la production gazière de ce pays a augmenté de plus de 40 % pour répondre aux besoins chinois). Les grandes quantités de gaz vont venir de Russie, sur la base d’un contrat signé en mai dernier et d’un accord d’octobre dernier.

1) En mai de cette année, la Russie et la Chine ont signé un accord pour la livraison sur 30 ans de 38 Mm3 de gaz d’une valeur de 400 milliards de dollars (13,3 milliards de dollars /an sur 30 ans). Le gaz russe, provenant des gisements de Tchaïanda et de Kovykta (Sibérie Orientale), sera acheminé en Chine par le gazoduc Sila Sibiri (La Force ou Puissance de la Sibérie).

2) Les pourparlers entre Gazprom et la société chinoise CNPC sur les livraisons de gaz par le « tracé occidental », en empruntant le gazoduc Altaï (en projet), ont repris, débouchant sur un accord de principe, lors du 19e sommet sino-russe. Il devra acheminer 30 Mm3 de gaz par an, pour alimenter l’ouest de la Chine, en puisant dans les gisements consacrés jusqu’à présent à l’Europe. En discussion : prix et conditions de construction du gazoduc. L’accord pourrait être signé d’ici à la fin de 2014. Les livraisons pourraient être ensuite augmentées jusqu’à 160 Mm3. L’âpreté des négociations sur le prix entre Russes et Chinois est notable, et leur longueur qui peut s’étaler sur une décennie (avec les Chinois, le diable reste dans les détails).

3) Dans le « business » énergétique entre la Russie et la Chine, cette dernière contourne la stratégie russe de verrouillage de la Caspienne avec les flux d’hydrocarbures kazakhs et turkmènes transitant via les portes de Dzoungarie, en direction du Turkestan chinois.

Japon

Le Japon est le 4e plus grand consommateur d’énergie du monde et le 1er importateur mondial de GNL. Le secteur de l’énergie au Japon est l’un des plus importants au monde (127,35 millions d’habitants d’un niveau de vie très élevé donc gros consommateur d’énergie). Sans ressource notable, son secteur énergétique dépend essentiellement des importations, notamment des combustibles fossile : 1er importateur mondial de gaz naturel, 2e pour le charbon et 4e pour le pétrole ; ces importations ont été fortement accrues à partir de 2011, du fait de l’arrêt presque complet de la production des centrales de Fukushima (en 2010, le nucléaire assurait 29 % de la production d’électricité, 3e rang mondial pour sa production nucléaire). Le Japon de l’après Fukushima absorbe 60 % de la production gazière GNL de Sakhaline. Le gouvernement de Shinzo Abe arrivé au pouvoir en décembre 2012 a annoncé son intention de faire redémarrer ces centrales dès que les inspections de la nouvelle Autorité de sureté nucléaire, NRA, auront été terminées.

En 2012, la consommation totale d’énergie primaire du Japon se répartissait en 94 % d’énergies fossiles (pétrole : 46,7 %, charbon : 23,4 %, gaz : 23,9 %), 0,8 % de nucléaire (13 % en 2010) et 5,3 % d’énergies renouvelables (dont 3,6 % d’hydroélectricité).

Le contrat gazier russo-chinois de 400 milliards de dollars (durée : 30 ans) a provoqué un déclic à Tokyo, qui voit désormais le rôle croissant de la Russie en matière de la livraison des hydrocarbures en Asie. À Tokyo, un groupe de 33 députés du Parlement japonais s’est dit favorable à la construction d’un gazoduc entre l’île russe de Sakhaline et la préfecture japonaise d’Ibaraki au Nord-est du pays. Ils espèrent que ce projet sera inclus dans le programme de la visite d’État du président russe Vladimir Poutine au Japon, prévue en 2015, sans doute à l’occasion de la célébration du 160e anniversaire de la signature du traité de Shimoda, premier accord diplomatique entre la Russie et le Japon conclu le 7 février 1855. Malgré le soutien japonais aux sanctions américaines et européennes contre la Russie par rapport à sa position sur l’Ukraine, ces députés défendent le lobby des hommes d’affaires japonais qui se sont engagés dans le renforcement de la coopération avec la Russie dans le secteur de l’énergie. Le facteur chinois semble avoir été décisif : le Japon ne veut pas que dans le domaine de la coopération avec la Russie la Chine puisse dominer dans l’Extrême-Orient. Le Japon est contraint d’acheminer le pétrole du Moyen-Orient à travers la mer de la Chine du Sud et la mer de Chine orientale, ce qui peut susciter des risques liés au transit, ce qui amène le Japon à réfléchir à la construction d’un gazoduc depuis la Russie. L’achat de gaz naturel russe par gazoduc ferait faire au Japon de sérieuses économies par rapport au transport du GNL par méthanier tel qu’il se fait aujourd’hui, un moyen de transport plus coûteux et plus périlleux. La première usine russe de liquéfaction de gaz naturel a été ouverte à Sakhaline en février 2009. Sa capacité étant de 9,6 millions de tonnes de GNL par an, elle reçoit le gaz acheminé par un gazoduc de 800 km. Parmi les clients de l’usine figurent des compagnies japonaises, américaines et sud-coréennes.

La distance entre Sakhaline et le Japon est le sixième de celle séparant le Japon du Proche-Orient et près de la moitié de la distance de l’Indonésie. La réduction des frais de transport permettra au Japon de proposer aux Russes un prix d’achat du gaz avantageux pour eux. Il n’en reste pas moins que la part de la Russie dans les importations japonaises de GNL est de 4,3% et celle de l’Indonésie, de 20%.

Corée du Sud

En avril 2014, Moscou a effacé 90 % de la dette nord-coréenne, soit la quasi-totalité des 10 milliards de dollars de dettes contractées par le pays en vue de faciliter la construction d’un gazoduc de Gazprom reliant les gisements gaziers de Sakhaline et de Sibérie à la Corée du Sud pour y livrer 10 Mm3 de gaz par an. Toutes les parties impliquées (Moscou, Pyongyang et Séoul) seraient gagnantes. La Corée du Sud, 2e importateur mondial de gaz, approvisionnée exclusivement par voie maritime, pourrait réduire ses coûts d’approvisionnement en gaz naturel jusqu’à 30 %. Les droits de transit perçus par la Corée du Nord pourraient s’élever quant à eux à 100 millions de dollars par an. Le nucléaire couvre près d’un tiers de la production électrique sud-coréenne (29,5 %). L’objectif des autorités est d’atteindre les 60 % d’ici 2030.

Inde

Les relations russo-indiennes sont historiques et l’Inde, aux côtés de la Russie et la Chine fait partie des BRICS. Avec la deuxième population du monde et les ambitions industrielles de son nouveau Premier ministre, Narandra Modi, la consommation de gaz va croître très rapidement, surtout dans les secteurs de la production d’électricité et des engrais (représente près des 3/4 de la consommation indienne). Le pays est importateur net depuis 2004. En 2010, l’Inde consommait environ environ 65 MMm³ (en hausse de 21 MMm³ en 2 ans) mais n’en produisait qu’environ 51(en provenance en grande partie des zones offshore de l’ouest, en augmentation de 63 % par rapport à 2008).  En 2010, les importations nettes étaient estimées à 12 Mds m³. En 2012, l’Inde importait 32 % de ses besoins en gaz naturel.

New Dehli prévoit d’engager des pourparlers sur un prolongement du futur gazoduc russo-chinois vers l’Inde à l’instar de ce qui est envisagé pour le tronçon indo-pakistanais du gazoduc Iran-Pakistan.

IV . Le marché du gaz, généralités

Rappel : le marché du gaz naturel s’organise autour de six grands pôles : la production, le transport, les terminaux méthaniers, le stockage, la distribution et la commercialisation.

 Deux possibilités sont offertes pour l’approvisionnement des fournisseurs de gaz.

  • les marchés spot, où le gaz s’achète au jour le jour et dont le prix est fixé dans l’instant – sans être adossé au pétrole. C’est sur ces marchés que l’on peut enregistrer de fortes baisses.
  • les contrats de long terme avec des entreprises fournisseurs. Une voie plus sûre pour garantir l’approvisionnement.

 Les marchés spots sont des marchés au comptant. Pourquoi utiliser une expression différente ? Probablement parce que les opérations s’y dénouent très vite.

C’est en principe un terme technique. L’expression est de plus en plus utilisé pour donner à la notion de « marché au comptant » une dimension plus instantanée.

La définition classique du marché spot est utilisée lorsqu’il s’agit d’un marché au comptant portant sur les devises, les taux ou les matières premières. C’est donc un marché de livraison spécialisé : par opposition à un marché à terme, les opérateurs qui traitent sur un marché spot, ou un marché au comptant, le font pour recevoir ou livrer des valeurs ou des marchandises à des taux négociés. Avec une petite nuance pour ce qui concerne les marchandises. Un achat spot de 100 000 barils de brent ne sera peut-être jamais livré à l’acheteur. Celui-ci, à peine acheté, l’aura peut-être revendu à un autre opérateur. Tant que le pétrolier n’est pas arrivé à quai ou mieux encore, tant que la marchandise n’a pas été transbordée, l’acheteur final peut changer. Il y a, en revanche, une chose qui ne change pas : traitée sur un marché spot, la marchandise atterrit bien dans un port pour être livrée ! Ce qui fait toute la différence avec un contrat à terme. Dans ce dernier cas, la livraison n’intervient que parce que l’un des opérateurs dans l’opération financière a fait défaut ou que l’opération n’a pas pu être menée à son terme.

Dans le domaine des transports, maritimes essentiellement et des matières premières, et parmi elles, celles qui est la plus « tradée » le pétrole, les marchés spot recouvrent des transactions au jour le jour et dont le prix est fixé dans l’instant (on the spot). Les principaux marchés du spot pour le pétrole brut ou raffiné sont Londres, New York, Singapour et Rotterdam. Les prix ne sont pas le résultat de cotations bien que, dans le domaine du pétrole, ceux qui ont été pratiqués sur le marché fassent l’objet d’estimation sur la base des échanges effectués. Les références de prix spot sont réalisées sur les principaux pétroles bruts (Brent, WTI, Dubaï) et sont utilisées comme indicateurs quant à l’évolution du prix du brut et pour certaines clauses d’indexation.

Il existe aussi un marché spot pour l’affrètement des navires qui est un indicateur économique très fort. Ce marché n’est pas non plus un « marché organisé » où se confrontent une offre et une demande de fret. Il résulte de l’ensemble des opérations d’affrètement qui sont négociés chaque jour.

Le marché du Gaz dont la libéralisation a été accentuée est de plus en plus un marché spot alors qu’il a été longtemps organisé autour de contrats à long terme, sur des durées supérieures à 5 années, passés entre les producteurs et les entreprises de distribution de gaz. Une part de plus en plus importante des livraisons est maintenant le fait d’opérations spots.

Sur le marché des changes, le marché Spot est bâti sur un échange de deux monnaies à un taux de change fixé. Le délai de livraison au comptant est de deux jours ouvrables, excepté pour le Dollar Canadien, un jour ouvrable.

Le marché de gros du gaz (08/01/2014)

Le marché de gros du gaz s’adresse aux professionnels du gaz naturel. En France, il concerne principalement le fournisseur historique GDF Suez Gaz de France, ses approvisionneurs étrangers comme Gazprom (Russie), Sonatrach (Algérie), Statoil (Norvège), ainsi que ses concurrents fournisseurs historiques (EDF) et alternatifs (Direct Energie, eni). Les fournisseurs de gaz naturel doivent s’approvisionner au meilleur prix sur les marchés de gros du gaz naturel afin d’être en mesure de proposer des offres de fourniture de gaz compétitives sur le marché de détail. Pour cela, les fournisseurs de gaz naturel ont recours à deux types de marché : le marché de gré à gré (over the counter) et les marchés organisés.

Le marché de gré à gré du gaz naturel : les contrats de long terme

Le marché de gré à gré représente en Europe la très grande majorité du gaz naturel échangé sur les marchés de gros. Les contrats de long terme sont le mode d’approvisionnement traditionnel des opérateurs historiques, qui s’engagent sur le long terme (20-30 ans) à acheter un certain volume de gaz à des producteurs de gaz. Les contrats de long terme sont souvent passés sur le mode du take or pay (l’acheteur supporte le risque de volume). En contrepartie, le vendeur du gaz s’engage à être en mesure de livrer ces quantités de gaz sur le long terme, offrant une grande visibilité à l’acheteur sur ses approvisionnements.

Les contrats de long terme d’approvisionnement en gaz naturel ont des clauses faisant varier leur prix en fonction du prix des produits pétroliers (fioul lourd et fioul domestique), avec un décalage de trois à six mois dans le temps. En effet, le gaz naturel est concurrencé dans tous ses usages par les dérivés du pétrole : il est donc logique que son prix varie largement en fonction de celui de ses substituts.

Si le marché de gré à gré continue à occuper la large majorité des volumes de gaz échangés sur les marchés de gros, c’est parce qu’il procure une grande sécurité à l’ensemble des parties représentées. Les acheteurs connaissent les volumes de gaz qu’ils peuvent commercialiser sur les marchés de détail et sont assurés que le prix de leur contrat n’évoluera pas de manière incontrôlée et volatile : le système de l’indexation lissée sur plusieurs mois permet de faire évoluer les prix du gaz de manière progressive. Réciproquement, les vendeurs trouvent également leur compte dans les contrats de long terme : la certitude d’avoir des débouchés sur le long terme leur permet d’investir massivement dans les infrastructures d’extraction et de transport de gaz naturel, en étant assuré d’avoir des cash-flows suffisants pour dégager de la rentabilité.

Le marché organisé du gaz naturel

Les marchés organisés du gaz naturel (bourses du gaz) correspondent à un très faible pourcentage des volumes de gaz échangés sur le marché de gros en Europe. L’ouverture à la concurrence des marchés du gaz a néanmoins conduit à l’émergence de plateformes organisées d’échange de gaz naturel, comme le marché de Zeebrugge (Belgique), le TTF (Pays-Bas) et surtout le NBP (Royaume-Uni). Aujourd’hui, seuls les volumes échangés sur le NBP sont suffisamment significatifs pour donner que le prix puisse être considéré comme une référence.

En France, la bourse de l’énergie Powernext a lancé en avril 2007 la plateforme Balancing GRTgaz, qui permettait une cotation du gaz naturel en vue de la couverture des besoins d’équilibrage du gestionnaire de réseau de transport GRTgaz (filiale de GDF Suez). Les entreprises pionnières ayant participé à ce marché étaient ENI, Gas Natural, Gaselys et Total Gas and Power. La première esquisse d’un marché organisé du gaz naturel en France était née.

En novembre 2008, Powernext a fait évoluer son offre pour lancer un véritable marché organisé du gaz naturel, où les acteurs du marché du gaz peuvent s’échanger du gaz livré aux différents points d’échange de gaz (PEG) du territoire français. La nouvelle offre inclut Powernext Gas Spot (marché au comptant) et Powernext Gas Futures (marché à terme). Au lancement de la nouvelle offre, onze entreprises participaient à l’aventure : Total Gas and Power, EDF Trading, Direct Energie, ENOI, Gaselys, Gazprom Marketing and Trasing, Mercuria Energy Trading, Morgan Stanley, The Royal Bank of Scotland et Vitol. Powernext Gas Spot et Powernext Gas Futures permettent l’échange de contrats sur des temporalités variées : Within-Day (le jour même), Day-Ahead (du jour pour le lendemain), week-end, mois, trimestres, saisons. La livraison physique du gaz naturel s’effectue sur les réseaux de GRTgaz et TIGF aux points d’échange de gaz (PEG).

Au fur et à mesure que se développent les échanges sur Powernext Gas, les prix du gaz publiés par cette bourse du gaz deviennent une référence pour les acteurs de marché. Les références de prix correspondent au prix du gaz pour livraison le lendemain (Day-Ahead) ou le mois suivant (Month-Ahead) à chaque point d’échange de gaz (PEG). A la fin 2009, les échanges Day-Ahead sur Powernext Gas représentaient tout de même 5% de la consommation française de gaz naturel. Ce chiffre marque le développement progressif des marchés organisés du gaz naturel.

L‘échange de gaz sur les marchés organisés ne correspond en France qu’à une stratégie d’approvisionnement à la marge pour les fournisseurs de gaz naturel. En effet, les fournisseurs de gaz tiennent à obtenir une visibilité de long terme sur le coût de leur approvisionnement, afin de proposer des offres durablement compétitives à leurs clients. Le gros de leurs approvisionnements passe ainsi par des contrats de long terme. Les marchés organisés du gaz, assez peu liquides et assez volatiles, ne constituent donc qu’un moyen d’ajuster le niveau de leurs approvisionnements aux besoins de leurs clients.

Les points d’échanges de gaz (PEG)

Les échanges sur le marché de gros du gaz naturel se concrétisent à des points virtuels appelés points d’échange de gaz (PEG). C’est au niveau de ces points que s’opèrent les échanges entre fournisseurs de gaz et l’approvisionnement en gaz des gestionnaires des réseaux de transport de gaz pour l’équilibrage des bilans journaliers.

A chaque point d’échange de gaz (PEG) correspond une zone géographique. On compte aujourd’hui trois zones géographiques sur le marché du gaz naturel en France : la zone nord (une moitié nord du territoire), la zone sud-ouest, et la zone sud.

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