Le temps des prédateurs. La Chine, les États-Unis, la Russie et nous, François Heisbourg, Odile Jacob, avril 2020

En 1793, l’Angleterre contrôle « un empire sur lequel le soleil ne se couche jamais ». Mais impossible d’ouvrir le marché chinois aux produits britanniques. L’empeur Qianlong considère alors les présents britanniques comme de simples tributs qu’un monarque barbare devait à l’empire du Milieu. L’empire Qing (1644-1911) est au faîte de sa puissance et connaît une stabilité remarquable avec 1/3 de la production mondiale et plus d’un tiers de l’humanité. ). Il faudra attendre après 1945 pour que les États-Unis s’approchent d’une contribution comparable à la production mondiale. La Chine ne concède rien, ni ambassade britannique permanente à Pékin, ni accès aux principaux ports chinois (sauf Canton).

La mission diplomatique de Macartney qui rentre en 1794 permit de mieux connaître les forces et faiblesses de la Chine pour préparer une attaque en règle car la « Chine est un vieux navire intimidant ses voisins par ses seules taille et apparence. Il pourrait dériver comme une épave et se briser. Mais il ne pourra jamais être reconstruit à partir de sa coque d’origine. La désintégration de la puissance chinoise n’est pas improbable. »

En 1973, la Chine a touché le fond avec le siècle des humiliations des étrangers suivi d’un demi-siècle de guerres civiles et catastrophes causées par le PCC.

Ont ravagé la Chine :

  • 1ère guerre de l’Opium (1839-1842),
  • 2e guerre de l’Opium (1856-1860),
  • La rébellion messianique et anti-mandchous des Taiping,
  • la Russie qui impose la cession d’1 million km2 de territoire dont le port de Vladivostok (1,5 x la France).
  • la révolte des Boxers en 1900 qui met à feu et à sang le quartier des légations étrangères à Pékin et qui est réprimée par 100 000 soldats étrangers.

Au début du XXe siècle : 16  villes chinoises passent sous juridiction étrangère et la Belgique entreprend de grands chantiers ferroviaires. La Chine perd aussi la suzeraineté sur les « royaumes tributaires » au profit des Français (Indochine), Japonais (Corée – 1ère guerre sino-japonaise 1894-1895) + perte de Taiwan.

En fait, la Chine demeure un Etat souverain, les prédateurs se livrant à une politique de soumission et de pénétration organisée autour des concessions et des points d’appui plutôt qu’à un dépeçage colonial comme en Afrique, en Inde, en Asie du Sd-Est à la même époque.

Seuls le Japon et la Russie pratiquent une politique massive d’annexion. Trop faible, la Chine n’arrivera même  plus à jouer les puissances étrangères les unes contre les autres.

Après 1911, rien ne s’arrange :

  • la Mongolie extérieure (3x la France) échappe à la souveraineté chinoise ;
  • la Russie, tsariste puis soviétique, fait peser son influence dans le Xinjiang ;
  • les seigneurs de la guerre se disputent la Chine postimpériale.

1931 : invasion par le Japon de la Manchourie (2x la France). La France de Vichy et l’URSS reconnaissent cet État fantoche.

1937 : début de la Seconde Guerre mondiale our la Chine, à la suite de « l’incident du pont de Marco-polo ». Ainsi, le Japon occupe l’essentiel de la Chine utile. Le gouvernement chinois doit se replier dans le Sichuan.

1946 à 1949 : guerre civile féroce entre nationalistes et communistes. Puis départ des troupes nationalistes à Taiwan.   

Fin 1950 : la Chine intervient massivement en Corée. L’APL repousse au sud du 38e parallèle les forces américaines et alliées qui avaient atteint le Yalu après leur contre-offensive victorieuse contre l’invasion de la Corée du Sud par le régime de Pyongyang. Un cessez-le-feu est signé en 1953.

Grand Bond en avant : 30 millions de morts (1958 – 1962)

1966 : début de la Grande Révolution culturelle prolétarienne.

1973 : la Chine est exsangue avec la Bandes des Quatre au pouvoir. 180 ans après l’ambassade de Macartney, le PIB chinois est :

  • inférieur de moitié à celui du RU,
  • à peine le double de la Suisse;

Et la Chine a des échanges extérieurs inférieurs à ceux de Taiwan dont le gouvernement est encore reconnu par l’ONU.

  • 1964 : la Chine dispose de la bombe atomique. Elle a récupéré Port-Arthur, repris le Xinjiang et annexé le Tibet
  • Moscou est tenté de décapiter la force nucléaire chinoise naissante par une frappe préventive.
  • 1972 : la rencontre Nixon-Mao écarte définitivement le risque de guerre avec l’URSS et lève progressivement les obstacles diplomatiques et économiques occidentaux à une très improbable – à l’époque – participation de la Chine à la mondialisation (1973). […]