Mongolie, un sous-sol plein d’attraits

Mongolie, un soussol plein d’attraits

Éléments documentaires, avril 2013

Rémi Perelman, Asie21

À l’attention du lecteur : certaines données chiffrées sont indiquées entre parenthèses, du fait de leur variation selon les sources.

I – Le secteur minier dans l’économie mongole

En août 2007, le secrétaire d’Etat aux affaires étrangères, Khasbazaryn Bekhbat, assurait que son pays serait capable de ” quintupler d’ici huit ans l’actuel revenu par tête de 1 000 dollars l’an avant de doubler ce dernier chiffre à l’échéance de 2021… “ ” En trois ans, se félicitait-il, le PNB a grimpé de 30 %. Satisfaction ministérielle mise à part, l’économie mongole est de taille modeste (PIB en 5,3 milliards de dollars en 2008 ; 2011 : 8,6). Mais principalement grâce au boom minier, la Mongolie espère faire tripler son PIB d’ici à 2020. Le secteur minier est estimé actuellement à 20% du PIB et pourrait représenter 50% du PIB dès 2016. 

La croissance, essentiellement due à la hausse du cours des matières premières stimulée par la demande chinoise, est soutenue depuis 2002 (8,9% en 2008, -1,6% en 2009 à cause de la crise mondiale, 6,4% en 2010, 17,5 % en 2011 selon la Direction du Trésor, 11,8% en 2012).  Les perspectives de moyen terme restent excellentes : 15 % en moyenne selon les prévisions du FMI pour les 8 prochaines années). La croissance a été de 355% au pour les 30 dernières années, ce qui constitue un record mondial. Une ombre au tableau, l’inflation se situe à un niveau élevé (+10% en 2011). : 11 % de croissance en 2011, 17 % en 2012. Quoi qu’il en soit, la dynamique de croissance actuelle offre au pays une visibilité nouvelle en Asie.

Selon le site www.business-mongolia.com (16 et 17 janvier 2013), en 2012, la Mongolie exportait 20,9 million de tonnes de charbon, 574 000 tonnes de concentré de cuivre, 6,4 million de tonnes de minerai de fer, 3 570 barils de pétrole brut, 2, 8 tonnes de minerai d’or brut ou à demi-traité et 140 000 tonnes de concentré de zinc. Le charbon représentait 43,2 % des exportations du pays, le concentré de cuivre, 19,1 % et le minerai de fer, 12,1 %. Les exportations de minerai de fer avaient augmenté de 10 % par rapport à l’année précédente et celles de pétrole brut, de 40 %. En dépit des tendances baissières et du ralentissement de l’économie chinoise, la Mongolia’s Mineral Resource Authority prévoyait que les exportations de charbon augmenteraient de 32 % cette année.

Les gisements mongols

Durant les presque sept décennies de règne communiste, le pays ne comptait que deux mines. Seul l’allié soviétique, avec des technologies de l’époque, pouvait explorer le sous-sol mongol : environ 30% seulement du territoire de ce pays montagneux et désertique a pu être exploré. Il n’en va plus de même depuis 1990.

Le charbon

La Mongolie possède deux importants gisements de charbon, celui de Tavan Tolgoi (l’un des plus grands du monde) et d’Ukhaa Khudag dont la production devrait atteindre 15 millions de tonnes en 2013. Ce sont précisément l’abondance des gisements du désert de Gobi-sud qui motivent l’intérêt des grandes sociétés minières et oriente les politiques des États dont elles sont issues. Considéré comme l’une des plus grandes réserves inexploitées de houille du monde, le gisement de Tavan Tolgoï, Les cinq collines, 6,5 à 7 milliards de tonnes dont 40% à 65 % de charbon à coke à valeur calorifique élevée (matière première principale pour la production d’acier) pour une valeur d’au moins 300 milliards de dollars. Ovoot Tolgoi exploité par SouthGobi Energy Resources, une division du canadien Ivanhoe Mines avec participation financière du fonds souverain chinois, CIC, via sa filiale Fullbloom Investment Corporation (Hong Kong) ; 125 millions de t. mesurées). Selon le président de RZD, Vladimir Iakounine, la mise en valeur des gisements mongols requerra au moins 7 milliards de dollars, par conséquent, la mise en œuvre du projet sera impossible sans les ressources puisées dans le budget russe.

Le projet de mise en valeur du gisement de Tavan Tolgoï proposé par la société RZD (Chemins de fer de Russie) prévoit la construction d’un embranchement du Chemin de fer d’Oulan-Bator (dont 50% appartiennent à la Russie) d’où la houille serait transportée par le Transsibérien vers les ports russes d’Extrême-Orient, pour être livrée ensuite au Japon et à la Corée du Sud. D’où la création, en mai 2009, d’une entreprise conjointe russo-mongole dénommée “Développement des infrastructures” en vue d’attirer les investissements dans le développement des chemins de fer mongols. La Mongolie contribuera sous la forme de droits à exploiter Tavan Tolgoï, tandis que la Russie y mettra 1,5 milliard de dollars. RZD apporte son aide technique (prêt de locomotives et de wagons ainsi que de personnel). Fin 2009, 108 kilomètres de rails auraient été posés.

Les grandes compagnies minières et les sidérurgistes comme ArcelorMittal voient avec un grand intérêt une telle quantité de charbon arriver sur le marché, avec pour conséquence de réduire la hausse de son cours.

Cuivre et or : le projet Oyu Tolgoï
Située dans le désert de Gobi, à 550 km au sud d’Oulan-Bator et à 80 km de la frontière chinoise, la « Colline turquoise » (Oyu Tolgoï, en mongol) est le plus grand projet de mine d’or-cuivre en développement actuellement dans le monde. Le gisement contiendrait 18,6 (ou 31-32) millions de tonnes de cuivre et 21 (ou 32) millions d’onces d’or (ou 1 328 tonnes) et environ 7 000 tonnes d’argent, exploitable à ciel ouvert. Après de premières prospections concluantes, la compagnie minière de Vancouver Ivanhoe Mines s’est engagée dans le projet en mai 2000. En octobre 2009, après un long processus de négociation avec l’État mongol et un milliard de dollars d’investissement dans la prospection et le développement du projet, l’entente pour l’exploitation était finalement signée. Les travaux préparatoires, effectués en 2010, incluent l’érection d’un chevalet d’extraction de 97 m de haut et la construction d’un aéroport régional capable d’accueillir des avions de la taille d’un Boeing 737. Le début de la production commerciale d’or et de cuivre devrait commencer en 2013. Selon l’accord, les normes fiscales et réglementaires pour l’exploitation du site sont fixées pour 30 ans. En 2009, Ivanhoe Mines avait déclaré vouloir investir 758 millions de dollars en 2010 dans le projet et de commencer l’exploitation fin 2013. L’investissement global serait de 3,5 (4,6) milliards de dollars. L’entente finale étant conclue, Oyu Tolgoï est un projet à « faible risque » pour Ivanhoe Mines selon la Banque mondiale. Fin avril 2011, le gouvernement mongol a pourtant promis à un mouvement civil qui faisait la grève de la faim notamment pour contester les termes de l’entente d’Oyu Tolgoï, de la réévaluer. Une promesse qu’il a peu de chance de tenir, mais qui rappelle la fragilité des accords commerciaux en Mongolie. Lors de ses 10 premières années d’activité, la mine, qui a une espérance de vie supérieure à 30 ans, devrait produire annuellement 1 milliard de livres de cuivre et 500 000 onces d’or (ou 450 000 tonnes de cuivre et 330 000 onces d’or durant 60 ans). Sa production représenterait alors entre 10% et 15% du PIB de la Mongolie.
Le gouvernement mongol contrôlera 34% des parts dans la compagnie conjointe OT LLC, sans toutefois rien investir dans son développement. La compagnie minière canadienne contrôle 66% de la mine de cuivre à ciel ouvert géante d’Oyu Tolgoi. Rio Tinto, après avoir été actionnaire minoritaire d’Ivanhoe Mines (22,4 %), qui s’était réservé le droit d’acquérir 43,1 % du canadien, avec possibilité de monter à 46,6 % voire 49 % par des achats sur le marché. Ceci fait à la suite d’une opération hostile*, Ivanhoe Mines est effectivement contrôlée aujourd’hui par Rio Tinto, qui a gagné son bras de fer avec la direction du groupe canadien, un arbitre indépendant ayant décidé qu’elle pouvait devenir majoritaire dans Ivanhoe. Elle alors agira comme « partenaire stratégique », aidant au financement du projet, estimé à 5 milliards et assumera la responsabilité directe du projet minier Oyu Tolgoi.
Temasek, le fonds souverain d’investissement de Singapour, a annoncé en juin 2012 qu’il allait prendre 5,5 % du capital d’Ivanhoe Mines.
NB. Créé en 1974, Temasek, est un fonds d’investissement basé à Singapour avec 12 filiales ou bureaux en Asie et en Amérique Latine. Son portefeuille était de 193 milliards de dollars, au 31 mars 2011, peut-on lire sur le site du groupe. A cette date, ses investissements dans l’énergie et les ressources ne dépassaient pas 3% du total. Le fonds, dont 36% du capital est investi dans des actifs financiers, s’est progressivement diversifié. L’an dernier il a engagé 1 milliard de dollars dans la compagnie américaine de gaz naturel Chesapeake Energy et dans le brésilien Odebrecht Oil & Gas. En mai 2012, associé au groupe de Hong Kong RJR Capital, il a dépensé 468 millions dans un autre gazier, Cheniere Energy, basé à Houston. Les deux associés ont ensuite pris une participation dans le chinois Kunlun Energy, une filiale de PetroChina. Temasek contrôle également des actifs miniers en Afrique du Sud et au Chili.
* http://indices.usinenouvelle.com/matieres-premieres-industrielles/bataille-pour-le-controle-d-oyu-tolgoi.3140

L’uranium

Une politique déclarant stratégique l’exploitation de l’uranium (loi sur l’énergie nucléaire adoptée à l’été 2009) est la première étape qui pourrait suivre, notamment dans le secteur hautement stratégique qu’est celui des terres rares. La loi stipule que l’État mongol sera actionnaire majoritaire dans tout projet concernant l’uranium. Le développement du secteur de l’uranium, exclu de la législation minière commune, entre dans le giron de l’État avec un statut particulier. Avec cette décision la Mongolie s’est accordée des prérogatives importantes. La loi prévoit que l’État doit détenir au moins 34 % du capital de la société avec laquelle il coopère si l’exploration a été effectuée sans fond public. Dans le cas où des fonds publics auraient été utilisés, la participation de l’État doit s’élever au minimum à 51 %.

Si les principaux gisements d’uranium connus en Mongolie, à savoir celui de Donrod et de Gurvanbulag ont été attribués respectivement à la Russie et à la Chine, il n’en reste pas moins que ces derniers pourraient être marginalisés par de nouvelles découvertes à court ou moyen terme.

Une entreprise conjointe russo-mongole a annoncé en août 2009 qu’elle allait extraire jusqu’à 2 000 tonnes de minerai par an pour l’exportation. La Russie, qui dispose de réserves pour cent ans, veut en effet renforcer ses positions sur le terrain et affaiblir ses concurrents.

En outre, les métaux spéciaux (tungstène, nickel…) ne manquent pas ainsi que les 17 terres rares devenues indispensables aujourd’hui (les gisements chinois de terres rares, principaux fournisseurs du monde en la matière, sont exploités par Inner Mongolia Baotou Steel RareEarth (Group) Hitech dont le centre principal se trouve, comme l’indique son nom, à Baotou, dans la région autonome de Mongolie intérieure et à environ 500 km au sud-est des gisements précités de Oyu et Tavan Tolgoi.

L’activité minière chinoise

La Chine, premier consommateur mondial de charbon. Le pays est le plus gros utilisateur au monde de charbon, son économie en dépend pour 70%. Sa propre production ne couvre pas ses besoins, cette année ses importations sont estimées à plus de 110 millions de tonnes ce qui pourrait ravir au Japon, son titre de premier importateur mondial.

En 2013, le principal moteur de l’activité restera la demande chinoise qui capte 86% des exportations mongoles et stimule l’investissement dans les secteurs des matières premières et des infrastructures. Mais le sentiment antichinois est presque unanime dans la population mongole.

Le gisement Tavan Tolgoi, est considéré comme l’une des plus grandes réserves inexploitées de houille du monde. Il recèle entre 6,5 et 7 milliards de tonnes de minerais, dont plus d’un quart est composé de charbon de qualité supérieure, à coke qui sert essentiellement pour la fabrication d’acier. Le gisement permet une production de 15 millions de tonnes sur les trois prochaines décennies et dont 65% sont constitués de charbon à coke. Le gisement, d’une capacité de production de 15 millions de tonnes par an au cours des trois prochaines décennies et situé à moins de 270 km de la frontière chinoise, représente une aubaine pour la Chine, premier producteur mondial d’acier, qui arrive difficilement à subvenir aux besoins et à la demande de son industrie. En s’associant au japonais Mitsui, le chinois Shenhua effectuera l’importation du minerai directement via le Gobi jusqu’au port de Tianjin.

China Shenhua Energy Company dit « le géant noir », le second exploitant mondial de mines de charbon au monde (5 mines : Shendong, Zhunge’er, Baorixile, Shengli et Baotou), également producteur et de distributeur d’électricité et d’énergie éolienne, est présent en Mongolie. En septembre 2011 un accord était signé selon lesquels 40 % des parts de la société d’exploitation du gisement de Tavan Tolgoi, l’immense mine de charbon à coke, seraient attribuées à China Shenhua, 24 % à l’américaine Peabody Energy et 36 % à un consortium russo-mongol. Fin 2012, le gouvernement mongol le dénonçait. Une loi en préparation devrait déclarer d’importance stratégique l’eau, le pétrole, le gaz, les minéraux radioactifs et les terres rares et soumettre leur exploitation à des conditions plus contraignantes que ne l’imposait la loi en cours depuis 2006. D’où les renégociations.

La mainmise de la Chine sur le gisement lui aurait permis, face à la Mongolie, de négocier en position de force sur le prix du charbon. Ce qui a conduit Oulan-Bator à convier la Russie et  la Corée du sud à partager la manne, un jeu réussi d’équilibriste. Les trois investisseurs devront selon l’accord, s’acquitter de taxes et de redevances liées au projet et verser de l’argent au gouvernement mongol, ce qui lui permettra l’exploitation d’un autre secteur du gisement de Tavan Tolgoi.

II – L’économie mongole : « les contre et les pour »

La Mongolie a été longtemps assistée (20 % du revenu national provenait du Comecon avant 1990, et 25 % depuis, grâce à l’aide internationale (Japon, Banque Mondiale et FMI en tête apportent 98 dollars par habitant), son décollage économique est récent. Il reste de ce fait, entravé par divers facteurs négatifs sans cesser cependant de présenter un intérêt certain pour les investisseurs. On peut penser en effet que ce sont des « défauts de jeunesse ».

« Les contre »

Versatilité et imprécision du droit des affaires, fragilité des accords commerciaux en Mongolie

Si l’Institut Fraser, un think tank néolibéral canadien, avait jugé les destinations en tenant compte strictement de leur potentiel, la Mongolie se serait retrouvée dans le haut du classement, mais il la place parmi les 10 destinations minières les moins accueillantes. L’industrie minière mongole ne prendra véritablement son envol que quand les règles du jeu concernant l’environnement fiscal, législatif seront claires et que la stabilité politique sera assurée.  Ex : Khan Resources, une petite société de Toronto, s’est vu retirer ses licences d’exploration et d’exploitation d’un gisement d’uranium fin mars, pour un vice de forme contesté. Elle y avait déjà investi 20 millions de dollars. Ses déboires ont créé une onde de choc dans le cercle des minières. En attendant une politique claire, les investissements étrangers d’envergure resteront marginaux.

 Les mises au point successives du cadre législatif du secteur minier

Les droits et l’exploitation des ressources du sous-sol d’importance stratégique sont en effet soumis à des conditions plus contraignantes que ne l’imposait la loi initiale relative au secteur minier, en cours depuis 2006 a été modifié à pluseurs reprises, de manière à tenir compte d’une situation en pleine évolution. Ce qui explique la renégociation des contrats pour lesquels les pourparlers avaient commencé avant la promulgation de la loi.

À la mi-avril 2010, le président du pays Tsakhia Elbegdorj a annoncé que plus aucune licence ne serait émise tant qu’une nouvelle loi sur les mines ne serait pas rédigée. Selon lui, le processus d’attribution commençait à « ressembler aux activités du crime organisé ». Le Business Council of Mongolia, BCM, s’est manifesté auprès du président par une lettre du 7 janvier 2012 pour lui faire part, sans détour, des dégâts qu’allait provoquer pour l’économie du pays la révision de la SEFIL dans le sens du renforcement des conditions et contrôles : elle allait rebuter les investisseurs potentiels, elle stopperait la prospection minière et ternirait la réputation du pays. Le BCM demandait qu’une période de 6 mois précède le vote de la loi, afin que chacun puisse s’exprimer. Cette demande ainsi que les diverses tentatives menées par les investisseurs étrangers concernés, chinois notamment, pour réduire la portée des nouvelles dispositions, ont été ignorés par le président Elbegdorj.

Le parlement mongol a adopté en mai 2012 une loi (Mongolia’s Strategic Entities Foreign Investment Law, SEFIL) visant à limiter l’investissement étranger à 49 % dans les parts d’une entreprise d’un des trois secteurs définis comme stratégiques : les mines, les banques et les télécommunications. Cette loi, qui fait suite à la tentative de rachat par le géant étatique chinois Chinese Aluminum Corporation, Chalco, de parts de SouthGobi Resources appartenant au Canadien Ivanhoe, devenu depuis Turquoise Hill), répond à la volonté affichée par le gouvernement mongol, en pleine période d’élections législatives (juin 2012) de rester un acteur souverain sur son propre territoire et sur les biens considéré comme importants pour la communauté mongole, notamment l’eau, le pétrole, le gaz, les minéraux radioactifs et les terres rares.

L’application de cette loi a entraîné une baisse de confiance sur les marchés et sensiblement refréné les investissements étrangers, ceux-ci ayant en effet baissé de 44% en septembre 2012 par rapport à la même période l’année précédente.

Les investisseurs étrangers se sont à nouveau inquiétés, au début de 2013, de la volonté présidentielle de retoucher la SEFIL. La loi devrait requérir l’identification de l’ensemble des actionnaires de l’entité candidate à l’exploitation minière lorsqu’elle est étrangère ou que la transaction dépasse le montant de 70 millions de dollars. Le 18 mars 2013, le premier ministre Altankhuyag annonçait que le gouvernement préparait un amendement de la SEFIL réservant les restrictions – notamment l’approbation par le parlement – aux seules entreprises publiques dans la mesure où elles exprimeraient leur intention d’acquérir plus de 49 % des parts d’une entité opérant en Mongolie dans les secteurs dits stratégiques (mines, finances et communications).

L’instabilité politique et la corruption

Les élections législatives de juin 2012 ont été remportées par le Parti Démocrate. N’ayant pas rassemblé la majorité des sièges au Parlement, un gouvernement de coalition rassemblant le Parti Démocrate et deux petits partis populistes a du être mis en place. Dans ce contexte, l’instabilité politique du fait des dissensions internes à la coalition – notamment sur la présence des compagnies étrangères dans le secteur minier jugé stratégique – devrait perdurer. De plus, les lacunes en matière de gouvernance (en particulier la corruption – 90% des Mongols pensent que les politiciens bénéficient d’arrangements spéciaux avec les compagnies étrangères dans l’exploitation minière – et le manque d’efficacité du gouvernement) constituent le talon d’Achille du pays. Enfin, le risque social est à surveiller en raison des inégalités croissantes et de l’inflation élevée.

Le gouvernement essaie de régler les problèmes au cas par cas en fonction de la situation et des interlocuteurs, mais il a encore les réflexes d’une approche centralisée de planification de l’économie : les dirigeants mongols, pour la plupart d’ex-communistes reconvertis, n’arrivent pas à se départir de leurs vieilles habitudes.

La future élection présidentielle est prévue en mai 2013.

Structures de production déficientes

La Mongolie est l’un des pays les plus pauvres du monde, avec un tiers de la population en dessous du seuil de pauvreté. Isolée du reste du monde, enclavée entre la Chine et la Russie, ses infrastructures (transports, énergie, assainissement) sont très déficientes : peu de route, un climat difficile, des ressources naturelles peu accessibles, un régime foncier marqué par le nomadisme. En revanche, sa main-d’œuvre est jeune et éduquée (taux d’alphabétisation inférieur a 95%), les coûts sur place sont très attractifs.

« Les pour »

Les perspectives sont somme toute favorables aux investissements étrangers

Pourquoi investir en Mongolie ? Ce pays n’est plus une sorte de périphérie géopolitique. Les plus grands pays du monde, Russie, Etats-Unis, Chine, se disputent l’influence sur ce territoire. La Russie et la Chine veulent que ce voisin constitue un partenaire sûr. Washington, à l’inverse, refuse de voir Moscou ou Pékin renforcer leur implantation dans cette zone, et à ce jour, dans la sphère géopolitique, le meilleur moyen d’exercer une influence n’est pas de signer des accords politiques, mais de proposer de l’argent, que ce soient des contrats, des crédits ou des projets. C’est justement ce que fait la Russie ces derniers temps, avec beaucoup d’ardeur.

La croissance rapide enregistrée depuis une dizaine d’années dans un climat de « ruée vers l’or » (« futur Qatar de l’Asie ») offre plus généralement des perspectives favorables aux investissements étrangers (IDE, en milliard de dollars : 1 en 2010, 5 en 2011, stock fin 2011 : 10), un contexte que le ralentissement économique dans l’ancien monde rend d’autant plus attractif. Par exemple, pour répondre à la hausse de la demande en énergie, lié à l’essor du secteur minier et à l’abondance des ressources naturelles, qui se conjugue à une démographie croissante, un consortium (détenu à 30% par International Power – filiale à 100 % de GDF-Suez –, à 30% par le japonais Sojitz Corp, à 30% par le sud-coréen Posco Energy et à 10% par le groupe mongol Newcom LLC) va investir 1,3 milliard de dollars retenu dans la construction à Oulan-Bator d’une centrale de cogénération au charbon de 415 MW (capacité totale du marché électrique en Mongolie : 856 MW) et de production de vapeur (chauffage urbain) de 587 MW, destinée à satisfaire la moitié des besoins de la capitale (mise en service : 2015).

Sont présents : Américains, Canadiens, Chinois, Coréens, Russes, Allemands et Anglo-australiens (BHP Billiton et Rio Tinto). Ayant réactivé ses réseaux de l’Est (feue la RDA) l’Allemagne est beaucoup plus présente que la France en Mongolie, dont elle est le partenaire européen privilégié. Il y a 30 000 germanophones à Oulan-Bator (70 000 selon l’Association France-Asie, N° 56 Mongolie, du 23/01/2013) contre 600 à 1 000 francophones (600 est le chiffre des inscrits en 2012 à l’Alliance Française). Une coopération de défense germano-mongole s’est nouée dès 1993. Les militaires mongols s’entraînent sur du matériel allemand. Pour sa part, la France avait donné une bourse il y a quelques années pour un colonel mongol francophone au Collège Interarmées de la Défense. Début 2013, Paris achève la négociation d’un “arrangement technique” de défense.

Bien que 168e fournisseur de la Mongolie, la France n’est cependant pas totalement absente, grâce à

  • Areva (depuis 1996 ; études et la formation de cadres dans le domaine de l’énergie nucléaire, prospection – 28 licences d’exploration sur plus de 14 100 km2 – et exploitation de mines d’uranium ; activité concentrée dans le sud-est du désert de Gobi, qui recèle le gisement de Dulann Uul.
  • Alcatel (depuis 1992 ; fourniture d’équipements téléphoniques, réseau de nouvelle génération)
  • 26 petites entreprises ou représentations et 200 ressortissants français (voir annexe).

Les possibilités agricoles sont presque inexploitées et situées près d’un immense marché de consommateurs qu’est la Chine, pays limitrophe ;

la question de la redistribution de la rente minière s’est imposée comme l’un des enjeux majeurs du débat public

les activités extractives génèrent peu d’emplois directs. De ce fait, les autorités mongoles entendent favoriser le développement d’autres secteurs essentiels comme l’agriculture, qui fait vivre 40% de la population.

Les bonnes performances macroéconomiques demeurent cependant fragiles compte tenu des défis liés au développement rural (le mode de vie nomade concerne encore près d’un tiers de la population), aux problèmes d’environnement (78% des sols et des écosystèmes sont dégradés) et à la dépendance du pays à l’égard de la conjoncture mondiale,

De grands projets de plusieurs milliards d’euros existent pour l’avenir : métro et nouvel aéroport d’Oulan Bator, nouvelle ligne de chemin de fer vers Vladivostok, ville nouvelle,

Le Fiscal Stability Fund

En 2011, cinq nouveaux fonds souverains ont émergé dont le Fiscal Stability Fund de la Mongolie, alimenté par la rente minière. Ce fonds devrait pouvoir soutenir dans un futur proche le développement nécessaire des infrastructures économiques et sociales et lui permettre une relative autonomie financière. En dépit de ce potentiel, le haut niveau de corruption dans l’attribution des licences d’exploitation de gisement minier au sein même de l’administration mongole demeure un énorme obstacle.

III – La stratégie internationale de la Mongolie

Depuis la chute du régime communiste en 1992 la Mongolie a adopté une politique extérieure originale. Enclavée entre les deux puissances russe et chinoise, elle participe au grand jeu asiatique. Sa stratégie vise la préservation de l’intégrité territoriale et le maintien de la souveraineté nationale. Dans un pays où les gigantesques ressources minérales aiguisent l’appétit de nombreux Etats, cette posture défensive s’impose. Elle repose sur une stratégie concentrique comportant trois paliers ayant chacun pour but de garantir l’indépendance et la sécurité au pays de Genghis Khan.

Au niveau national, l’enjeu primordial pour Oulan-Bator est de disposer d’une force d’autodéfense et de sécurité à la fois efficace, moderne et compétente et qui soit reconnue comme telle à l’étranger. Les dirigeants mongols cherchent prioritairement à intégrer militairement leur pays dans la zone Asie-Pacifique. L’adhésion de la Mongolie en tant que membre observateur de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) en 2004 ou sa participation récente à l’exercice militaire Angkor Sentinel au Cambodge en mai dernier participent au renforcement des capacités militaires mongols. La Mongolie s’engage également dans de nombreuses opérations de maintien de la paix au sein de l’ONU. A l’heure actuelle, le pays déploie près de 150 militaires, soldats et observateurs, en Afghanistan, au Darfour, au Sahara occidental et en République Démocratique du Congo. Près de 900 militaires mongols ont également été dépêchés en Irak depuis 2003 pour soutenir la sécurité et la reconstruction nationale. Au-delà de cet engagement militaire, ces opérations menées à l’extérieur permettent aux forces mongoles d’acquérir en retour une expérience de terrain essentielle pour la sûreté du territoire mongol, en cas d’agression potentielle de Moscou ou de Pékin. Si ce petit Etat n’a évidemment aucune prétention de pouvoir un jour écarter la menace extérieure, son armée professionnelle lui procure, même très relatif, un certain sentiment de sécurité.

Sur le plan régional, le principal défi des élites mongoles est de maintenir un équilibre entre l’influence des Chinois et celle des Russes, en misant sur la forte concurrence économique et politique à laquelle ils se livrent sur son sol. Si la Chine, avec une part de marché représentant plus de 70 % (ou 90) des exportations mongoles, est sans contredit le premier partenaire économique de la Mongolie, la Russie en est indiscutablement son premier fournisseur. 100 % des hydrocarbures et 80 % du blé mongol proviennent de Russie, ce qui soulève un sérieux problème de dépendance qui n’a fait que s’aggraver au cours de la dernière décennie, avec notamment l’envolée des prix du gaz et des denrées alimentaires. Aussi, la Mongolie tente-t-elle tant bien que mal de maîtriser le niveau de pénétration économique de chacun de ses deux voisins. Suivant cette logique, tout accord politique, économique ou commercial conclu avec l’un sera inéluctablement contrebalancé par la conclusion d’un accord de même ampleur avec l’autre. La ratification le 6 janvier 2011 d’un accord sur le nucléaire civil entre Moscou et Oulan-Bator vient d’être récemment compensée en juin par la signature d’une entente économique et stratégique à hauteur de 500 millions de dollars entre Pékin et Oulan-Bator. Il en va de même pour les visites officielles : quelques semaines seulement auront séparé la visite de courtoisie du président mongol Tsakhiagiin Elbegdorj à Moscou, du 30 mai au 3 juin, de celle de son premier ministre Sukhbaatar Batbold à Pékin effectuée du 15 au 17 juin. Cette subtile manœuvre d’équilibre des puissances allège quelque peu les inquiétudes économiques de ce pays encore très pauvre et plus que jamais dépendant de son voisinage.

La scène internationale est le troisième volet de cette stratégie vise le desserrement de l’étau russo-chinois qui risque de réduire la marge de manœuvre des dirigeants mongols. Il s’agit de créer de nouvelles alliances stratégiques à l’étranger, tout en ménageant la susceptibilité des Russes et des Chinois. Dans cet ordre d’idée, la Mongolie entretient des liens très étroits avec le Japon, les Etats-Unis, l’Allemagne ou encore le Danemark, pour ne citer que ceux-là. Ces coopérations bilatérales s’organisent dans différents domaines : économique et commercial (dans le cadre du marché unique, avec plusieurs pays de l’Union européenne), politique (pour le Japon, en tant que médiateur ponctuel dans le conflit nord-coréen) et militaire (en tant que membre de la coalition en Irak, avec les Etats-Unis). Ses besoins expliquent en grande partie les efforts importants entrepris par l’Etat mongol auprès des grandes chancelleries occidentales et asiatiques afin d’attirer de nouveaux investisseurs, notamment dans le secteur des infrastructures.

En attendant la rente minière, la Mongolie reste un pays en voie de développement au mode de vie nomade (près d’un tiers de la population). Son fonds souverain, créé en 2009, devrait pouvoir soutenir dans un futur proche le développement nécessaire de ses infrastructures économiques et sociales et lui permettre une relative autonomie financière. Ce potentiel explique l’obstacle que constitue le haut niveau de corruption dans l’attribution des licences d’exploitation de gisement minier au sein même de l’administration mongole. 

Une certaine visibilité internationale

Statut international :

  • Membre de l’OMC depuis 1997
  • Observateur de l’Organisation de Coopération de Shanghai (OCS) en janvier 2004
  • 2012, la Mongolie a signé son premier partenariat avec l’OTAN, la Mongolie a, enfin, réussi à s’en rapprocher, en signant un “programme individuel de partenariat et de coopération”, au même titre que l’Australie ou le Japon.
  • La Mongolie participe depuis une décennie aux opérations de maintien de la paix sous mandat des Nations unies, notamment au Sierra Leone. Elle a également participé à des opérations sous commandement de coalitions, en Irak, en Afghanistan, et au Kosovo. Quelque 10 000 de ses soldats ont pris part à des opérations à l’extérieur du pays. Au Soudan, le sixième des troupes de Nations unie sont formées de Mongols (850 soldats et 7 officiers).
  1. Sur les 28 attachés de défense étrangers accrédités à Oulan-Bator, seuls trois sont permanents, l’Américain, le Russe et le Chinois. Ils seront rejoints, en 2013, par les Turc et Nord-Coréen.

Les immatriculations de navires marchands sous pavillon mongol se multiplient

La Mongolie, à la recherche de revenus, se dote d’une flotte commerciale significative. Celle-ci compte actuellement environ 300 navires (dont 23 pétroliers), originaires de plus de 40 pays, surtout asiatiques : Japon, Singapour, Indonésie et Cambodge sont les principaux « clients ». Dopées par des coûts d’enregistrement compétitifs et par des avantages fiscaux incitatifs, les immatriculations de navires marchands sous pavillon mongol se multiplient.

(Patrick Dombrowsky in Lettre Confidentielle Asie21 n° 23, novembre 2009). 

IV – Les relations de la Mongolie avec ses voisins et les autres

Chine et Mongolie : les relations sinomongoles

Le Premier ministre chinois a rencontré le Premier ministre mongol, Norovyn Altankhuyag le 6 décembre 2012. À cette occasion, M. Wen a déclaré que « la Chine et la Mongolie avaient établi un partenariat stratégique et que les deux nations devraient sincèrement mettre en place les accords qu’ils ont signés » (Quotidien du Peuple). Le gouvernement chinois encourage les entreprises chinoises à accroître leurs investissements en Mongolie, et souhaite renforcer la coopération bilatérale dans l’énergie et les ressources, les infrastructures et l’agriculture.

La crainte de la Chine

Les responsables chinois connaissent bien leur histoire. Ils ont en tête le Mongol Koubilaï Khan, fondateur de la dynastie « chinoise » des Yuan au XIIIe  siècle et, aujourd’hui, la Chine considère avec beaucoup de sérieux ses relations avec les Mongols. Tant Pékin que Taipeh reconnaissent l’indépendance de la Mongolie (mais des cartes de la RPC montrent le territoire chinois englobant la Mongolie « extérieure »). En revanche, Pékin est soucieux des influences démocratiques voire « pan-mongoles » qui pourraient émaner d’une Mongolie dont le régime est démocratique (3,18 millions d’habitants) et inspirer ses ressortissants de la Région autonome de Mongolie intérieure (23,76 millions h. dont une population minoritaire mongole de 6 millions h.).

Les tensions dans son voisinage sont en effet ressenties par la Chine comme des menaces potentielles. Depuis l’ouverture, en 1980, la Chine met en œuvre une politique de bon voisinage, s’efforce de régler paisiblement les disputes frontalières et fait en sorte de prévenir les alliances nouées à son encontre par des pays réputés « hostiles » comme les États-Unis ou le Japon. Lorsqu’après les événements de Tiananmen, les relations économiques avec l’Occident se sont réduites, Pékin a mis en place une « politique périphérique globale » reprenant le thème du « 21e siècle, siècle de l’essor rapide de l’Asie-Pacifique », accompagné de la montée du « nouvel asianisme » appuyé sur les valeurs asiatiques, du modèle de développement asiatique, des blocs régionaux succédant au monde bipolaire de la Guerre froide et de la politique de la périphérie proprement dite, concernant notamment la Mongolie. L’importance de celle-ci pour Pékin ne s’est jamais démentie, même lorsqu’elle appartenait au cercle soviétique. Un mois après la fin de l’URSS, de hauts dirigeants chinois se rendaient à Oulan-Bator pour retisser des liens, éloigner la présence russe et prévenir un retour des Américains et des Japonais. Un Traité d’amitié et de coopération, signé en 1994, confirmait l’indépendance de la Mongolie et le respect de son intégrité territoriale. En juin 2003, Hu Jintao récemment désigné comme le président de la RPC, faisait un stop à Oulan-Bator à l’occasion de l’un de ses premiers déplacements à l’étranger, marquant le prix que la Chine attachait à la stabilité des relations sino-mongoles et amenant la Mongolie à renoncer à participer à quelque alliance militaire hostile à la Chine.

De plus, l’important potentiel minier d’un pays enclavé entre la Chine et la Russie suscite un intérêt de nature économique et géopolitique. Le gouvernement mongol, conscient des risques pour la sécurité nationale et économique du pays et sensible au sentiment antichinois de sa population, ne veut pas laisser les grands projets miniers aux mains exclusives des Chinois (qui comptent déjà pour plus de 80 % des investissements étrangers en Mongolie) ou des Russes. Il s’efforce de diluer leur influence dans des consortiums avec des entreprises d’autres pays : les projets canadiens, américains, japonais ou autres l’inquiètent moins. D’où le concept de « troisièmes voisins », élaboré à l’occasion de la visite de l’Américain D. Rumsfeld en Mongolie en 2005. L’attribution de droits de prospection et d’exploitation à des compagnies de ces « troisièmes voisins » et d’une Russie préoccupée par l’intensification de l’activité des compagnies publiques chinoises, affronte par contrecoup l’opposition de la Chine.

La Mongolie sait toutefois manifester son indépendance : visites du Dalaï Lama à Oulan-Bator cinq fois répétées entre 1991 et 2006 (il est vénéré par la population mongole, qui pratique majoritairement le bouddhisme tibétain), accueil de Mongols fuyant la politique chinoise des groupes minoritaires en Mongolie intérieure, approfondissement des la coopération militaire de la Mongolie avec les États-Unis, marquée notamment par un programme de formation d’officiers depuis septembre 2011. La Chine répond en apportant une aide humanitaire entre 1991 et 2002, notamment lors des périodes de froid intenses des hivers qui se sont succédés entre 1999 et 2002, provoquant un désastre dans les troupeaux mongols. Un généreux programme de bourses d’étude et l’ouverture de la frontière pour permettre à des dizaines de milliers de Mongols de venir en Chine se faire soigner à frais réduits dans les hôpitaux chinois (Medical Treatment Agreement). Un programme de jumelage entre villes chinoises et mongoles a été développé. Le commerce transfrontalier, à l’avantage des Chinois, s’est accru avec l’ouverture de 9 « portails saisonniers » ajoutés au portail principal de Erlian/Zamyn Uud. Le commerce de la Mongolie avec Taiwan s’est également développé sans provoquer de mouvements d’humeur à Pékin où l’on s’est en effet rendu compte qu’une ligne dure était contre-productive et, surtout, que les usines de « sa » région autonome de Mongolie dépendaient de plus en plus des ressources du sous-sol de la Mongolie extérieure. Cependant la Chine est devenue beaucoup plus circonspecte dans ses relations avec la Mongolie.

Les investissements du fonds souverain chinois CIC

La China Investment Corporation (CIC) a conclu plusieurs accords, on ne s’en étonnera pas, dans le secteur des matières premières et énergétiques. Elle a ainsi annoncé un investissement dans le groupe de Hong Kong Noble, spécialisé dans les matières premières et agricoles, avant de conclure un accord avec une compagnie minière indonésienne, PT Bumi Resources Tbk., un opérateur dans les secteurs des mines et de l’énergie. Le 28 octobre dernier 2009, un investissement de 700 millions de dollars était annoncé dans Iron Mining International Ltd., une entreprise enregistrée à Hong Kong qui possède des mines de fer en Mongolie. Deux jours plus tôt, la CIC avait annoncé sur son site Internet avoir investi 500 millions de dollars dans une division du canadien Ivanhoe Mines, opérant une mine de charbon en Mongolie.SouthGobi Energy Resources Ltd, via sa filiale Fullbloom Investment Corporation. SouthGobi Energie Resources Ltd se consacre à la prospection et à l’exploitation du charbon, et concentre une grande partie de ses activités dans le désert de Gobi, au sud de la Mongolie, où elle gère la mine d’Ovoot Tolgoi (125 millions de t. mesurées). C’est la région où Ivanhoe Mines et son partenaire Rio Tinto doivent investir 4 milliards de dollars pour développer une mine de cuivre et d’or, Oyu Tolgoi, qui pourrait devenir une des plus grandes mines de cuivre au monde, selon un accord signé début octobre 2009 à Oulan Bator.

En juillet 2009, le ministère des Transports de Mongolie et le ministère des Chemins de fer de Chine ont signé un mémorandum de compréhension stipulant la participation de Pékin à la modernisation des chemins de fer de ce pays.

La Chine, qui absorbe la moitié des exportations mongole, a signé un mémorandum sur la modernisation des chemins de fer locaux et s’apprête à construire un embranchement ferroviaire qui lui permettra de récupérer le charbon des mines de Tavan-Tolgoï.

La coopération militaire sino-mongole

La coopération entre l’armée chinoise et les armées des pays limitrophes progresse en devenant plus pragmatique et approfondie. Depuis 2002, l’armée chinoise a entrepris tour à tour, avec des armées des pays limitrophes, des manœuvres et exercices conjoints ainsi que des activités de formation.

Avec la Mongolie, la coopération militaire s’est développée depuis 1990 sous forme de formation, d’échanges d’officiers ou d’aide sociale : Pékin a financé un programme de logements pour les soldats. Pour la première fois depuis l’indépendance arrachée à la Chine en 1921, la Mongolie a accueilli un détachement chinois sur son sol dans le cadre d’une formation commune aux opérations de maintien de la paix.

Des exercices conjoints sino-mongols baptisés « Mission de maintien de paix-2009 » ont débuté le 28 juin sur une base militaire de la région pékinoise, engageant respectivement 46 et 45 personnes. C’est la première fois que l’armée chinoise organise avec une armée étrangère ce genre d’exercice ayant pour thème le maintien de paix : définir en commun les tâches d’un contingent de maintien de paix dans le cadre des Nations Unies, exercices de poste de commandement, exercices de génie, de transport et de protection. Il s’agit du second exercice conjoint que l’armée chinoise entreprend avec un pays limitrophe après les exercices conjoints de protection et de sécurité avec l’armée singapourienne.

La Mongolie et la Russie

L’alliance entre la Russie et la Mongolie résulte avant tout d’un acte d’opportunisme et remonte au début du XXe siècle. Les Mongols profitèrent de la déliquescence de l’empire chinois pour proclamer leur indépendance et demandèrent de l’aide à la Russie. Héritière de celle-ci, l’Union soviétique a apporté à la Mongolie, entrée dans le Comecon en 1962, un important soutien militaire et économique (entreprises conjointes, chemin de fer, centres industriels, centrales thermiques etc.). En 1989, l’assistance économique fournie à la Mongolie par la sphère soviétique équivalait à 30 % du PIB. Les autorités russes peuvent encore compter sur la crainte profonde qu’inspire la puissance chinoise aux Mongols pour construire des relations contemporaines. Elles sont fondées sur le secteur minier.

La stratégie russe est caractérisée par :

  • La restauration de liens privilégiés avec les autorités mongoles (partenariat stratégique en 2009) ;
  • Le maintien des taux de participation détenus par les autorités russes dans certains grands projets mongols, (cuivre, chemins de fer), refus d’accéder aux demandes mongoles de renégociation ;
  • La participation d’entreprises russes dans les grands projets miniers (charbon, uranium, argent) ;
  • L’utilisation de la dépendance de la Mongolie en matière de carburants pour obtenir des contrats miniers, dans le gisement de charbon de Tavan Tolgoi notamment.

Ces objectifs majeurs permettent à la Russie de conserver son influence en Mongolie et de bénéficier de la forte croissance de l’économie mongole. Celle-ci pourrait d’ailleurs participer à la revitalisation de la façade orientale de la Fédération de Russie. Pour être efficace, la stratégie russe devra s’appuyer sur des investissements conséquents sous peine de se voir marginalisée par les « 3è voisins ».

 Coopération militaire

En février 2013, le ministre de la défense de Mongolie, Dashdemberel Bat-Erdene, conduisait une délégation de hauts responsables de l’armée à Moscou, sa première visite à l’étranger depuis sa nomination en août 2012, pour des discussions relatives aux exercices annuels conjoints anti-terroristes, comme chaque automne depuis 2008 (nom de code : Selenga+millésime). En 2011, ils se sont déroulés avec la participation de plus de 500 militaires et de 200 engins de combats et engins spéciaux, aussi bien en Russie (Bouriatie) qu’en Mongolie.

Le ministre a eu des entretiens avec son homologue, le général d’armée Sergueï Choïgou, l’un de ses plus fidèles soutiens, de V. Poutine et qui fut ministre des situations d’urgence pendant dix-huit ans et ministre de la défense depuis le 6 novembre 2012 (né en république de Touva, limitrophe de la Mongolie, Choïgou est quasiment un proche voisin pour Bat-Erdene).

La Russie a offert à la Mongolie de continuer à accueillir des élèves-officiers de l’armée mongole dans les académies militaires, notamment 18 jeunes cadets à l’école militaire Souvoroff d’Ekaterinbourg. 60 % des cadres de l’armée en cours de formation à l’étranger le sont en Russie, la majorité d’entre eux étant enfants de généraux, eux-mêmes formés en Union soviétique. Les Russes répondent ainsi à l’irritant exercice annuel de maintien de la paix (Khaan Quest) menée avec l’United States Pacific Command (USPACOM). En 2014, Russes et Mongols ont célébré le 75e anniversaire de la victoire des deux armées contre l’armée japonaise à Khalkin Gol, une guerre non officiellement déclarée entre les deux pays à la suite d’un simple accrochage frontalier. La Russie, après soixante-dix ans de coopération quasi exclusive avec la Mongolie, en reste le principal fournisseur d’armes du pays, rejointe cependant par l’Ukraine et la Turquie.

L’intérêt russe pour le secteur minier

Dashdemberel Bat-Erdene, qui a fait ses études à l’université de l’Oural à Sverdlovk en 1987, ancien parlementaire, est le président de sociétés à multiples activités (alimentation, construction, infrastructures, tourisme…) dans la région aride de Gobi. Il préside notamment la société publique Erdenes Tavan Tolgoi LLC (ETT) qui exploite le gisement de charbon de Tavan Tolgoi. En janvier 2013, ETT a annoncé qu’elle ne livrerait pas, contrairement aux années précédentes, les quelque 18 millions de tonnes de charbon à la compagnie chinoise Aluminum Corporation of China (Chalco) et menace de cesser toute livraison à l’avenir, provoquant une tension entre les deux pays et troublant le monde international des affaires. Il est probable que Bat-Erdene a évoqué l’affaire avec les Russes, très intéressés par l’exploitation des gisements mongols, tant pour l’uranium que pour le charbon. Les finalistes de l’appel d’offres pour le secteur ouest de Tavan Tolgoi étaient le géant américain Peabody Energy et l’entreprise publique chinoise Shenhua. Moscou ayant réagi avec vigueur, un consortium russo-mongolo-coréen avait été ajouté à cette courte liste, provoquant les protestations des milieux d’affaire concernés.

La mine et le rail

L’ambition des autorités mongoles est de construire une ligne ferroviaire qui relierait les principaux gisements de Gobi au sud du pays, afin de leur offrir un débouché sur le Pacifique via le port russe de Vladivostok et les ports de l’Extrême-Orient russe, pour bloquer les ambitions de la Chine dans son contrôle de la route du charbon via Tianjin. Bien que la majeure partie le minerai doive être transporté vers la Chine, qui utilise un autre système de rails, la Mongolie pense utiliser la technologie ferroviaire russe. Le fret devra donc être transbordé à la frontière, augmentant le coût de l’opération. NB. Les chemins de fer russes et mongols sont à l’écartement de 1 524 mm et utilisent l’attelage automatique SA3, une variante de l’attelage Willison tandis que la Chine utilise l’écartement normal de 1 435 mm et un attelage automatique analogue à celui des USA.

Pour tenter d’évincer les concurrents chinois, Moscou aura dû remplir tous ses engagements financiers. Il lui aura fallu investir 1,5 milliard de dollars dans la coentreprise « Développement de l’infrastructure » créée, à l’issue de la visite effectuée en mai 2009 par le premier ministre russe Vladimir Poutine en Mongolie, par la compagnie des chemins de fer de Russie (RZD) et les compagnies publiques mongoles Erdenes-MGL et Mongolyn tomor zam. Il lui aura également fallu participer pour 250 millions de dollars avant la fin de 2009 au capital social de la société du Chemin de fer d’Oulan-Bator (outre le versement de la moitié de sa part de capital, la Russie s’est engagée à aider la Mongolie à financer son propre investissement dans le projet).

Une filiale de RZD a entamé en mai 2010 l’étude de la ligne de chemin de fer d’Oulan-Bator (Mongolie) en vue de sa modernisation et de l’élargissement des voies pour permettre d’augmenter la vitesse des trains jusqu’à 120 km/h. sur le tronçon Mandal-Daavany

La concession exploitation et construction de l’infrastructure ferroviaire a été accordée en janvier 2013 à l’entreprise publique Mongolian Railway. Un financement de 55 millions USD lui a été dévolu à cet effet à partir de mi-février 2013

La Mongolie, entre Chine et Russie, aux portes des républiques d’Asie centrale, une cible du Japon

Texte de septembre 2006 (Rémi Perelman, Asie 21-Futuribles)

L’État mongol, fondé par Gengis Khan en 1206, célébrait son huitième centenaire cette année. Tokyo s’est associé à l’événement en faisant de 2006 l’Année de la Mongolie au Japon et, à sa suite, 2007, celle du Japon en Mongolie. Pourquoi tant d’attentions pour un pays enclavé de moins de 3 millions d’habitants ?

C’est que la Mongolie est située au « milieu des empires », selon une formule de Michel Jan (1) et que l’existence de ressources naturelles abondantes mais encore mal exploitées (2) ajoute un certain intérêt à cet avantage géopolitique : les visées stratégiques que suscite le pays incorporent une « diplomatie des ressources ».

Sortie de l’emprise de Moscou en 1990, ralliée à l’économie de marché et au multipartisme, la Mongolie a été très vite courtisée. Par ses voisins d’abord, la Chine, qui l’a reconnue comme État indépendant en 1946 et la Russie qui, après l’avoir laissée sur le bord de la route, tente aujourd’hui d’y retrouver ses marques (3). Pour sa part, adoptant une attitude pragmatique dès la fin de la Guerre Froide, la Mongolie a mis en œuvre une politique extérieure fondée sur la création de liens nécessairement amicaux avec ses deux puissants proches voisins, mais équilibrés à leur tour par des relations avec des tiers tout aussi prééminents, en l’occurrence : Washington (4) et Tokyo. Cette stratégie lui a permis de sauvegarder son indépendance, sa sécurité et d’obtenir le financement et la technologie nécessaires à son développement.

Les relations entre la Mongolie et le Japon contemporains portent la Chine en filigrane.

Il est intéressant d’évoquer à ce propos le Tanaka Memorial Imperialist Conquest Plan. En 1927, le Premier ministre Tanaka (4) aurait proposé à l’Empereur Hirohito ce plan qui faisait de la conquête de la Mandchourie et de la Mongolie le préalable à l’invasion de la Chine puis de l’ensemble de l’Asie orientale et du sud-est. Bien que les événements lui aient ensuite donné partiellement raison, il s’est cependant avéré dès 1929 que ce document n’était qu’un faux fabriqué par des agents chinois (5) …ou – moins probablement – russes soucieux de lancer la Chine contre le Japon.

Pour en venir à une histoire plus récente, les relations nippo-mongoles sont passées par trois phases. D’abord l’affrontement. Depuis 1932, les Japonais sont solidement installés en Manchourie, première ligne de défense de l’Empire contre les aspirations russes et avant-poste d’occupation de la Chine. En août 1939, ils tentent d’envahir la Mongolie, tenue par l’URSS, en vue d’atteindre le Transsibérien. C’est un échec total. La bataille du Khalkin Gol (6) voit l’anéantissement de la 23e division japonaise par l’Armée Rouge et les détachements mongols. Un traité de neutralité entre le Japon et la Russie est alors signé puis, en 1945, rompu pour repousser définitivement les Japonais hors du continent. Ensuite vient l’indifférence : les relations diplomatiques, reprises en 1972, restent formelles jusqu’à la fin de la Guerre Froide. S’ouvre alors la période de coopération.

Des raisons stratégiques expliquent cet intérêt de Tokyo pour la Mongolie. Le Japon est en effet aujourd’hui loin d’être satisfait de sa position en Asie orientale. Malgré sa puissance économique, des relations tendues avec la Chine et la Corée du Sud l’empêchent d’y exercer une réelle influence. D’où les efforts tentés, au sud, pour participer à des projets communs avec les pays de l’ASEAN (7) et, au nord, pour séduire la Mongolie. Les visites croisées se multiplient dès 1989 (8) tandis que les initiatives japonaises se diversifient et s’intensifient.

L’aide japonaise, généreuse, y est accueillie avec d’autant plus de gratitude que, conséquence du retrait de l’assistance de Moscou, le pays souffre d’une grave crise économique. Bien plus, elle cherche à construire un partenariat consistant dans le long terme. Depuis 1991, et pendant 15 années consécutives, le Japon – bien qu’il ne soit pas le seul – a été le premier donateur de la Mongolie, grâce tout à la fois à l’aide publique – y compris via la coopération décentralisée -, à l’investissement privé et à l’action des ONG (9). A l’origine, le dénuement du pays fait privilégier le volet humanitaire. Puis, à partir de 1997, l’effort porte sur la construction des infrastructures (énergie, transport, communications), l’accompagnement du développement économique (aide à l’évolution de l’agriculture, aux petites entreprises, à la protection de l’environnement et aux structures nécessaires à l’économie de marché) ainsi que sur l’amélioration de la santé publique et la formation des cadres. En 2002, l’aide met l’accent sur les relations culturelles, notamment avec l’édification d’un Centre culturel nippo-mongol (10) au sein de l’université nationale mongole et, en 2003, elle s’étend à l’ensemble des villages du pays (11). En conséquence, la popularité du Japon a atteint 70 % d’opinions favorables dans la population (12). En outre, de nombreux Japonais et Mongols croient avoir une origine ancestrale commune… Le Japon appuie la candidature de la Mongolie à l’ASEM, Asia-Europe Meeting.

En contrepartie, la Mongolie soutient sans état d’âme les positions japonaises dans les instances internationales : candidature du Japon (ainsi que celles de l’Inde et de l’Allemagne) à un siège permanent au Conseil de sécurité des Nations unies, participation à la création d’une majorité favorable au Japon à la Commission baleinière internationale – au grand dam des écologistes –, contribution à la politique de coopération, de sécurité et de stabilité régionale, notamment en collaborant à l’établissement d’un centre régional de formation dans le domaine du maintien de la paix…

À ce sujet, le Japon considère que la Mongolie dispose de deux avantages diplomatiques dont il est dépourvu : des relations étroites avec la République populaire démocratique de Corée et sa position d’observateur au sein de l’Organisation de coopération de Shanghai, OCS. Les premières sont mises à profit par Tokyo, qui trouve à Oulan-Bator un relais diplomatique détourné mais fort utile vers Pyongyang, qu’il s’agisse de la recherche d’un accord sur les dossiers du nucléaire militaire (Six-Party Talks), de l’arsenal de missiles ou du sort des citoyens japonais enlevés par le gouvernement nord-coréen. Le Japon ne peut qu’être satisfait des efforts qu’exercerait la Mongolie pour convaincre le régime de Pyongyang de réduire son agressivité et d’évoluer progressivement vers l’économie de marché. La seconde permet à Tokyo de ne pas être tenu complètement à l’écart de ce qui se dit au sein de l’OCS.

L’éclairage qu’autorisent ces deux appuis relationnels structure désormais le « forum de dialogue » instauré entre les Premiers ministres japonais et mongol, lors de la visite de ce dernier au Japon en mars 2006, en vue de débattre de la situation régionale.

La Mongolie, devenu en 1924 le second pays communiste dans le monde et resté sous ce régime jusqu’à il y a moins de vingt ans, est l’un des trois plus pauvres pays d’Asie (aux côtés du Bangladesh et de la Corée du Nord), mais elle est en passe de réussir paisiblement sa transition vers la démocratie et l’économie de marché.

Placée au centre d’un jeu de pouvoir exercé par les grandes puissances, Oulan-Bator parvient en à tirer habilement profit. Le Japon pour son propre compte comme pour celui des États-Unis, s’y est assuré une complicité en jouant dans la durée sur l’ensemble des facteurs du développement, économique, politique et culturel. Son statut actuel l’empêche encore de créer des liens militaires – les États-Unis s’en sont chargés – mais il y a fort à parier que si les changements constitutionnels attendus par une part grandissante de la population japonaise l’y autorisaient, la coopération militaire japonaise retrouverait rapidement le chemin de la Mongolie. Tokyo renforcerait ainsi une tête de pont sur le continent, un atout stratégique considérable dans la compétition ouverte avec la Chine et une étape dans une démarche plus ambitieuse encore vers l’Asie centrale et ses ressources énergétiques (15). Mais le Japon joue probablement le rôle d’un poisson-pilote pour les Américains, en voie d’éviction de cette région par l’Organisation de coopération de Shanghai.

  1. En 2001, le Japon a suspendu ses prêts à la Mongolie dans l’attente de l’apurement des dettes qu’elle avait contractées avec la Russie, ce qui a été fait en 2003. La reprise de l’octroi de prêts en yens, pour un montant de 3 milliards de yens (env. 25 millions de dollars/19,7 millions d’euros), destiné à des bourses d’études (316 millions de yens pour la période 2006-2009) au développement des petites entreprises et à la protection de l’environnement, a eu lieu en 2006, lors de la visite du Premier ministre mongol à Tokyo, fin mars 2006.

Notes

  1. Sources principales : Zhang Lijun, China Institute of International Studies, 22/09/2006; The Yomiuri Shimbun, 11/08/2006 ; Voice of America Tokyo; 29 March 2006; BBC News, 30/11/2005 Le Monde diplomatique, août 2004.
  2. RENE CAGNAT et MICHEL JAN, Le milieu des empires, entre URSS, Chine et Islam, le destin de l’Asie centrale, Paris, Robert Laffont, 1981, rééd. 1990).
  3. Pétrole réserves prouvées : 6 milliards de barils) et gaz naturel ; charbon (152 milliards/ t.) ; uranium (1,4 million/t.) ; or (13 millions/t.) ; cuivre (2 milliards/t.; molybdène, phosphore, tungstène et fluorine. L’activité extractive compte pour 20 % dans le PNB du pays, 4 fois plus qu’en 2002.
  4. Le chef du gouvernement de Russie, M. Fradkov, accompagné de financiers, s’est rendu en Mongolie le 18 juillet 2006 sur invitation du Premier ministre mongol. Plusieurs projets ont été abordés : 1) la banque d’Etat russe souhaiterait ainsi implanter une filiale en Mongolie ; 2) un projet commun de rénovation des chemins de fer mongols ; 3) la construction d’une raffinerie (qui serait intégralement financée par un investissement russe) ; 4) plusieurs sociétés énergétiques russes ont souhaité renforcer leurs investissements dans le secteur minier, et ce notamment afin d’accroître l’exploitation de la mine de Tavan Tolgoi ; 5) l’amélioration prochaine de l’environnement juridique ayant trait à la production (les compagnies russo-mongoles contribuent à 20% du produit national brut ainsi qu’à 50% des exportations du pays). NB. La Mongolie a notamment conservé l’usage de l’écriture cyrillique adoptée précédemment.
  5. Participation d’une centaine de militaires mongols à la coalition menée par les Etats-Unis en Irak (2003). Visite de G. W. Bush le 21 novembre 2005, suivie par celle de Donald Rumsfeld, Secrétaire à la défense, en vue de renforcer la coopération militaire avec ce « coin » enfoncé entre Chine et Russie. Manoeuvres militaires conjointes américano-mongole, « Khan Quest 2006 » en août de l’année suivante, avec participation de détachements du Bangladesh, Inde, Thaïlande, Tonga et Fiji.
  6. En 1925, alors qu’il était général, Tanaka avait présidé le parti nationaliste Seiyukai.
  7. Ce qui n’a pas empêché la propagande américaine de l’époque d’en faire le Mein Kampf du Japon dans le cadre du film The China Battle, le 6e de la série Why We Fight de Franck Capra. Présentée sous la forme d’un documentaire, cette série a été tournée dans les années 40 pour le ministère de la guerre américain. L’objectif du Tanaka Memorial y était alors montré non plus seulement comme visant la seule conquête de l’Asie, mais celle-ci comme le préalable d’une invasion des États-Unis : “Here was their mad dream. Phase One – the occupation of Manchuria for raw materials. Phase Two – the absorption of China for manpower. Phase Three – a triumphant sweep to the south to seize the riches of the Indies. Phase Four – the eastward move to crush the United States”.
  8. Cette cuisante défaite aura une conséquence importante : désormais, le Japon se tournera vers le Sud, vers la Malaisie, Singapour et l’Indonésie.
  9. Un pas important en ce sens a été la déclaration de Tokyo, publiée après le sommet ASEAN-Japon de décembre 2003, le premier sommet à réunir tous les chefs d’Etat de l’ASEAN hors d’un pays membre de l’association. Elle annonçait en effet clairement le but de réaliser la communauté d’Asie de l’Est. Cette déclaration signifie que la réalisation de ce projet est devenu un thème officiel pour la région.
  10. Petite chronologie. Le ministre des Affaires étrangères japonais s’est rendu à Oulan-Bator dès avril 1989, tandis que le Premier ministre mongol était invité au Japon en mars 1990, puis en 1992, 1993 et 1997, alors que son homologue japonais s’était rendu en Mongolie en août 1991, le premier à ce niveau venant du camp « occidental ». Le président Bagabandi, rendait une visite officielle au Japon en 1998, la première d’un chef d’État mongol, puis en 2003. Plus récemment, le Premier ministre mongol Enkhbold à peine élu, était à Tokyo en mars 2006 pour une visite de 5 jours et son homologue japonais, Junichiro Koizumi, tenant du titre jusqu’au 26 septembre de cette année, était, le 10 août 2006, le premier chef d’État étranger à avoir les honneurs de la place Sukhbaatar à Oulan-Bator. Entre juillet et août 2006, la Mongolie a reçu la visite de 80 parlementaires japonais. Nombreuses visites de ministres.
  11. Ainsi l’organisation Peace Winds Japan, qui s’est consacrée aux enfants des rues à Oulan-Bator ainsi qu’à l’équipement d’écoles en milieu rural.
  12. Projection de films japonais, festivals, télévision japonaise accessible (NHK), cours gratuits de langue japonaise, étape préalable à l’attribution de bourses d’étude au Japon (84 en 1994, 308 en 1998…) qui viennent à côtés de celles offertes par la Russie, la Chine et… Cuba. Sur le terrain, assistance aux fouilles de Karakorum, capitale mongole au XIIIe siècle. Introduction – à la demande d’Oulan-Bator – de légendes japonaises dans les manuels scolaires mongols.
  13. Assistance aux handicapés, réparation d’établissements scolaires, dons aux écoles d’ordinateurs et de postes de télévision, générateurs électriques et réseaux d’eau potable et d’assainissement pour les villages…
  14. En retour, les Japonais se souviennent notamment avec reconnaissance le soutien apporté par la Mongolie lors du grand séisme de Kobe-Hanshin en janvier 1995. Les lutteurs de sumô mongols ont également fait forte impression au Japon.
  15. Fin août 2006, Jurichiro Koizumi entreprenait une tournée de 4 jours au Kazakhstan et en Ouzbékistan. Il s’agissait de La première visite d’un Premier ministre japonais dans cette région depuis l’indépendance des deux anciennes républiques soviétiques en 1991.

La Mongolie et les deux Corée

La Mongolie est le seul pays qui entretient un dialogue entre les deux Corées. 5 000 Nord-coréens vivent à Oulan Bator. Les 15 et 16 novembre, la Mongolie a organisé une rencontre discrète entre deux délégations officielles du Japon et de la Corée du Nord.

La Mongolie et l’Inde

En août 2012, un contingent de 38 militaires mongols et de 44 homologues indiens du Jat Regiment ont effectué un exercice conjoint (Nomadic Elephant) de contre-insurrection à Belgaum dans l’État du Karnataka, dans le cadre d’entraînement à des opérations de maintien de la paix. Le premier de ces exercices remonte à 2004 et conduit en Mongolie jusqu’en 2008. En 2005, il était conduit à la Counter Insurgency and Jungle Warfare School (CIJWS) à Vairnagte, dans l’État du Mizoram.

La Mongolie et les Canada

Mai 2010. En attendant le vrai boom, les minières canadiennes placent leurs pions. Ivanhoe Mines aura mis plus de neuf ans à s’entendre avec le gouvernement mongol pour l’exploitation d’Oyu Tolgoï, le plus gros gisement de cuivre et d’or au monde encore non exploité. En signant l’entente en octobre dernier, elle aura dû concéder 34% des parts à l’État mongol. Malgré tout, au cours des cinq dernières années, des centaines de minières étrangères, dont une cinquantaine de canadiennes, sont venues s’installer en Mongolie, un pays qui compte environ trois millions d’habitants. Les intérêts économiques sont si importants qu’en 2008, le Canada a ouvert une ambassade à Oulan-Bator.

ANNEXES

Les entreprises françaises en Mongolie au 06.09.2012

Grandes entreprises : 2

       1.     ALCATEL. Depuis 1991. Fourniture d’équipements téléphoniques, GSM Principaux clients : Mobicom, Mongolia Telecom.

2.     AREVA MONGOL. COGEGOBI. Créée en 2008. Partenariat entre la COGEMA (70%) et GOBIGEO (30%) en 1997, aujourd’hui 100% Areva    Mongol. Prospection et extraction de minerai d’uranium

Tourisme : 10

  1. Organisation de voyages en Mongolie : treks, cheval, 4×4.
  2. CIEL MONGOL. Guest-house agence de voyage interprète.
  3. DESTIN NOMADE. Tourisme, organisation de voyages en Mongolie.
  4. HORIZONS MONGOLS VOYAGES .
  5. HORSEBACK ADVENTURES.
  6. LA MONGOLIE NOMADE.
  7. RANDOCHEVAL MONGOLIE.
  8. STEP’IN. Agence de voyage spécialisée sur le marché MICE (Meetings, Incentive, Congress and Events).
  9. WIND OF MONGOLIA. Société de tourisme.
  10. TSENKHER NAR CO LTD (SOLEIL BLEU). Créé en 1998. Société de tourisme et de logistique.

Commerce, services et logistique : 16

  1. ADVEST (Le Bistrot Français). Depuis 2002.
  2. LIBRAIRIE-PAPETERIE FRANCAISE PAPILLON. Depuis 2006. 5 salariés.
  3. CIS MONGOLIA. Catering international, gestion de bases-vie.
  4. WINX CONTINENTAL Depuis 1998. 27 salariés. Import/Export et transports internationaux. Agent transitaire.
  5. EAGLE SECURITY. Depuis 2001. Environ 500 salariés. Sécurité incendie.
  6. BIZ. Depuis octobre 2008. Informatique, création de site web Location de matériel (ménage, outils, camping).
  7. Open Mongolia. Secteurs : agriculture, élevage, construction, architecture, mines.
  8. ROSTAING MONGOLIE. Créée en 2010. Import, export et vente de la maroquinerie.
  9. FPM (Food processing management). Depuis 2006. Farine, lait, viande, fruits et légumes, autres produits alimentaires.
  10. SIRYAK LLC. Spécialiste des produits laitiers et fromagers.
  11. IPM (Ingénierie pharmaceutique modulaire).
  12. L’OCCITANE. Depuis 2010.
  13. YVES ROCHER. Présent depuis 1996. Magasin en franchise.
  14. LOUIS VUITTON MONGOLIA. Depuis 2009.
  15. A.D. Investment Solutions. Investissements étrangers dans le secteur de l’immobilier en Mongolie.
  16. MONGOL YURT. Depuis 2003. 39 salariés. Fabrication et exportation de yourtes, cachemire, mobilier et objets traditionnels mongols.

Quelques chiffres

Population : 3,18 millions d’habitants ;

Territoire : 1,6 million de km2 ;

Minerais : Cuivre, tungstène, nickel, or, fer ;

Importance économique du secteur minier qui contribue à :

– 12% de l’activité économique ;

– 40% des exportations du pays.

Quelques sources documentaires

– Le site présidentiel du chef d’Etat mongol.

Entre l’ours et le dragon: la stratégie internationale de la Mongolie, Blog Perspectives géopolitiques, 27août 2011.

Managing Mongolia’s resource boom, Banque européenne pour le développement et la reconstruction http://www.ebrd.com/downloads/research/economics/workingpapers/wp0138.pdf

Mongolia’s Geopolitical Gambit: Preserving a Precarious Independence While Resisting “Soft Colonialism” http://www.eai.or.kr/data/bbs/eng_report/2009052017262087.pdf

Mongolia: Growth, Democracy, and Two Wary Neighbors, http://www.nbr.org/research/activity.aspx?id=245

***