« La Chine est marginalisée sur le dossier nord-coréen »

La rencontre de Singapour marque les limites de la puissance diplomatique de Pékin, analysent les deux chercheurs Jean-Yves Heurtebise et Emmanuel Dubois de Prisque dans une tribune au « Monde ».

LE MONDE |  • Mis à jour le  |Par Jean-Yves Heurtebise (Maître de conférences à l’Université catholique FuJen (Taiwan) et Emmanuel Dubois de Prisque (Chercheur associé à l’Institut…

Tribune. Bien qu’elle ait mis aux prises les deux dirigeants les plus critiqués de la planète, la rencontre de Singapour changera peut-être la face de l’Asie orientale. C’est un paradoxe, mais alors que l’attention du monde se focalise souvent sur l’émergence de la Chine et que les spéculations des analystes vont bon train sur le rôle central qu’elle joue déjà sur la scène internationale, la Chine est aujourd’hui marginalisée sur le dossier nord-coréen.

La déclaration de Wang Yi, le conseiller de Xi Jinping pour les questions diplomatiques, le jour même du sommet, qui se félicite de cette rencontre et vante « le rôle constructif » traditionnel de la Chine sur ce dossier, ne doit pas faire illusion. A Pékin, le pouvoir observe avec appréhension le rapprochement entre Pyongyang et Washington.

Alors que les dirigeants chinois aiment à s’inscrire ostensiblement dans le temps long de la « renaissance » de la Chine et de l’Asie, Kim Jong-un et Donald Trump sont tous deux des enfants obéissants de notre époque, qui est celle de la « modernité liquide » chère au sociologue Zygmunt Bauman, où tous les engagements sont temporaires et conditionnels. Quelle sera la pérennité des accords conclus à Singapour, alors même que Donald Trump semble avoir fait de l’imprévisibilité une paradoxale ligne de conduite ? Comment croire à la parole d’un régime nord-coréen totalitaire, fondé sur la tromperie et la dissimulation ?

C’est une ironie de l’histoire, mais ce sont pourtant ces deux leaders, inlassablement épaulés par un très catholique président sud-coréen assoiffé de réconciliation, qui bousculent la donne stratégique aujourd’hui, tandis que Pékin, malgré tous les pronostics quant à son « émergence » géopolitique, malgré sa volonté de contrôle et malgré l’influence dont il dispose en Corée du Nord […]

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