La notion d’Asie centrale est-elle pertinente ?

La notion d’Asie centrale est-elle pertinente ? Dans la revue Défense nationale et sécurité collective (janvier 2009, p. 80-87), René Cagnat montre que, bien qu’elle soit riche en hydrocarbures, en uranium et en or, l’Asie centrale demeure plus vulnérable en raison des menaces extérieures que de l’étroitesse d’esprit de ses dirigeants. Sa seule sauvegarde, au moins pour l’Asie centrale de l’ouest, serait l’émergence d’une forme ou d’une autre de solidarité entre États. Chacun d’eux possède des richesses exploitables pouvant assurer leur développement et, plus encore, un développement commun. En bref, l’Asie centrale se fera-t-elle d’elle-même (“L’Italia fara da se !”) ou sera-t-elle dépecée entre les grandes puissances, jouant des troubles qui agitent sa périphérie (Tibet, Cachemire, Pakistan, Afghanistan, Iran, Caucase), y compris l’opium et la dialectique dictature/ terrorisme ? L’auteur, un fin connaisseur de l’Asie centrale pré- et post-soviétique, ne cesse de faire appel au passé pour imaginer une sortie de crise par la sagesse. C’est un sentiment bien sympathique, que rien pour l’instant ne vient corroborer. En revanche, l’application à l’Afghanistan et, éventuellement, au reste de l’Asie centrale, des méthodes de contre-insurrection tentées avec succès (pour le moment) par l’État-major étasunien est rien moins que douteuse. L’Ouzbékistan est, des cinq républiques ex-soviétiques d’Asie centrale, la plus potentiellement dangereuse. Mais toutes les autres aussi, du Caucase au Xinjiang, sont menacées par le même genre de maux qui ont suivi l’explosion de la Fédération yougoslave : l’absence de volonté politique claire et les progrès de la criminalisation.

L’auteur veut voir dans l’accord d’octobre 2008 entre les républiques la possibilité d’une germination de l’idée d’une union des États d’Asie centrale : cet accord prévoit de réguler les échanges et le transit de toutes les richesses de chacun Pourrait-il conduire à l’émergence de quelque chose ressemblant à une sorte de “marché commun centreasiatique” ? Ce serait la seule porte de sortie possible pour des pays qui, sans cela, n’ont d’autre avenir qu’être les proies de trois des plus grands prédateurs mondiaux : la Russie (la mieux placée), les États-Unis et la Chine. Et l’Europe, dans tout cela ? Ah oui ! L’Europe…

Pierre Gentelle, Asie21

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